
Depuis plus de dix ans, une affaire de meurtres non résolus hante la ville d’Albuquerque, au Nouveau-Mexique. Tout a commencé en février 2009, lorsqu’une femme en promenade avec son chien dans le secteur connu sous le nom de West Mesa fit une découverte macabre : un os humain apparut au sol. Ce fut le point de départ d’une enquête effroyable qui aboutit à la mise au jour des restes de 11 femmes et d’un enfant à naître. Terrifiés, les enquêteurs craignirent la signature du premier tueur en série de la ville.
Ces faits, désormais connus sous le nom des « meurtres de West Mesa », ont déclenché une vague d’enquêtes, d’interrogatoires et une attention médiatique considérable. Malgré les efforts acharnés des forces de l’ordre, les crimes restent non élucidés. Pourtant, les autorités ne baissent pas les bras : en février 2021, Holly Anderson, lieutenant par intérim de la division des crimes violents de la police d’Albuquerque, affirmait dans une interview que l’enquête se poursuivait, même en l’absence de nouvelles pistes tangibles. Elle rappelle qu’aucune prescription légale ne s’applique à de tels actes et que la police continuera à chercher la vérité tant que le mystère n’aura pas été levé.
Les victimes des meurtres de West Mesa

Selon la police d’Albuquerque, la découverte initiale d’un os par le chien Ruca avait éveillé les soupçons de Christine Ross, sa propriétaire. Infirmière de profession, sa sœur put confirmer qu’il s’agissait probablement d’un fémur humain et Christine alerta aussitôt la police.
En un an, les autorités avaient identifié les 11 victimes, âgées de 15 à 32 ans, toutes disparues entre 2003 et 2005. Parmi elles, Michelle Valdez, enceinte de 22 ans, dont les os du bébé à naître furent également découverts. Toutes les femmes, à l’exception de Jamie Barela âgée de 15 ans, avaient en commun leur implication dans la prostitution et la consommation de drogues. Par ailleurs, toutes étaient d’origine latina, sauf Syllannia Edwards, afro-américaine originaire de l’Oklahoma.
La police a proposé une récompense d’un montant de 100 000 dollars en échange d’informations menant à la capture de celui que la presse a surnommé le « West Mesa Bone Collector ». Plusieurs suspects ont été évoqués, dont deux principaux, mais aucune preuve définitive n’a permis de clore l’affaire.
Joseph Blea, un suspect au passé trouble

Parmi les suspects figure Joseph Blea, un homme connu de la police pour fréquenter les quartiers où se déroule la prostitution. En vingt ans, il a été interpellé plus d’une centaine de fois. Lors d’une perquisition, la police trouva dans sa voiture des cordes et du ruban adhésif électrique. Par ailleurs, sa famille découvrit chez lui des bijoux et sous-vêtements féminins ne leur appartenant pas, ce qui fut vérifié par les autorités.
En 2015, Blea fut reconnu coupable d’agressions sexuelles remontant aux années 1980 et 1990, et condamné à 90 ans de prison. Malgré les indices et le témoignage d’un ancien codétenu affirmant que Blea les qualifiait de “déchets” en parlant des victimes, aucun lien direct ne fut prouvé entre lui et les meurtres de West Mesa.
Lorenzo Montoya, mort dans des circonstances suspectes

Lorenzo Montoya, un autre suspect connu pour sa violence, avait été interpellé en 1998 pour proxénétisme. En 1999, il fut arrêté pour avoir violé et étranglé une sexagénaire qu’il ne comptait pas payer. Sa compagne l’avait également dénoncé pour violences conjugales, évoquant des menaces de meurtre avec mise en terre par la chaux vive.
Montoya fut tué en 2006 par le petit ami d’une victime qu’il venait d’étrangler près de son domicile, situé à deux miles du lieu d’inhumation des victimes de West Mesa. Bien que les meurtres aient cessé après sa mort, aucune preuve formelle n’a confirmé qu’il était bien le tueur en série recherché.
Un lien suspect avec un réseau de trafic sexuel inter-États

Les autorités suspectent que ces femmes aient pu être impliquées dans un vaste réseau de trafic sexuel s’étendant à travers plusieurs États. La présence d’une victime originaire d’Oklahoma, Syllannia Edwards, laisse penser à une coordination entre gangs de trafiquants opérant au Nouveau-Mexique, au Texas, au Nevada, au Colorado et dans la ville mexicaine de Juarez.
Le FBI a enquêté sur des routiers de longue distance comme suspects dans le meurtre de travailleuses du sexe le long des grandes routes. Une indication anonyme reçue en 2010 suggérait qu’un homme nommé Cota avait tué une femme surnommée « Mimi » ou « Chocolate » — des alias attribués à Edwards. Malgré ces pistes, l’affaire demeure non résolue à ce jour.
Assurer la sécurité des travailleuses du sexe à Albuquerque

En 1999, Cynthia Vigil Jaramillo, travailleuse du sexe, a été kidnappée et emprisonnée par David Parker Ray, surnommé le “Toy-Box Killer”, qui avait torturé et tué une quarantaine de femmes. Son évasion a permis son arrestation.
Suite à la découverte des victimes de West Mesa, Jaramillo et Christine Barber ont fondé une organisation pour protéger les travailleuses du sexe au Nouveau-Mexique, dénommée Safe Streets New Mexico. Ce groupe milite contre la violence affectant ce groupe vulnérable souvent ignoré par la société.
Il est important de rappeler que les travailleuses du sexe sont plus fréquemment victimes de crimes violents comme le viol ou le meurtre, mais ces affaires ne suscitent pas toujours l’attention suscitée par d’autres cas médiatisés, comme ceux des tueurs en série Ted Bundy ou Gary Ridgway. Ce dernier, surnommé le « Green River Killer », a assassiné près de 50 femmes, majoritairement des travailleuses du sexe, dans un silence médiatique relatif. L’objectif de Safe Streets New Mexico est de combler cette carence et d’assurer une protection effective à ces femmes souvent laissées pour compte.
