Dix-huit ans après la disparition de la petite Maddie, des opérations de fouilles sont en cours à Praia da Luz, au Portugal. Ces investigations, menées depuis mardi et prévues jusqu’à vendredi, se concentrent autour de la zone où la fillette de 3 ans avait séjourné avec ses parents au moment de sa disparition mystérieuse en mai 2007. C’est également dans cette commune que résidait alors le principal suspect, Christian Brückner, un Allemand au passé judiciaire chargé.
Ces recherches s’appuient sur un mandat émis par le ministère public de Brunswick, en Allemagne. Elles ciblent plusieurs bâtiments abandonnés ainsi que des zones broussailleuses près de l’ancienne maison du suspect. Les enquêteurs portugais et allemands utilisent notamment des radars de dernière génération capables de détecter la présence d’un corps enfoui à plusieurs mètres de profondeur. Ce déploiement technologique illustre la difficulté à obtenir des preuves matérielles dans cette affaire, où les précédentes fouilles n’avaient rien donné.
Un faisceau d’indices après des années d’impasse
Durant quinze années, les pistes suivies dans l’affaire Maddie se révélèrent infructueuses. Les parents de la fillette furent un temps suspectés mais ensuite blanchis. Les enquêteurs explorèrent ensuite des pistes impliquant deux pédocriminels écossais puis un premier suspect allemand, en vain. En 2020, un tournant majeur survint : la police allemande désigna officiellement Christian Brückner comme suspect numéro un. Si le procureur allemand s’est déclaré convaincu de sa culpabilité, il reconnut cependant l’absence d’éléments suffisants pour une inculpation.
À l’époque des faits, Christian Brückner vivait à la lisière de Praia da Luz, à environ sept kilomètres du lieu de vacances de la famille. Connu pour avoir commis des cambriolages dans des complexes hôteliers et appartements de vacances, son téléphone avait été localisé près du logement de la famille le soir de la disparition.
Le profil de Brückner est particulièrement préoccupant : il cumule dix-sept condamnations, dont plusieurs pour des violences sexuelles. En 1994, alors mineur, il avait été reconnu coupable d’un acte sexuel devant un enfant, et en 2016, pour possession d’images pédopornographiques.
Une libération prochaine sous surveillance
Actuellement, Christian Brückner purge une peine pour le viol d’une septuagénaire américaine en 2005, là même où Maddie a disparu. La victime avait raconté que son agresseur s’était introduit chez elle, l’avait attachée et bâillonnée. En examinant d’autres dossiers non élucidés de la région, les enquêteurs ont constaté des similitudes avec plusieurs autres affaires, dont celles d’une autre septuagénaire violée et d’une adolescente allemande de 14 ans violée elle aussi à Praia da Luz. Cette jeune fille avait été ligotée nue, fouettée, puis soumise à un rapport oral contre sa volonté.
En 2024, Brückner a été jugé en cour d’assises en Allemagne pour trois viols, dont deux des cas évoqués, ainsi que deux agressions sexuelles. Ce procès a suscité un large retentissement, les procureurs qualifiant l’accusé de « dangereux sadique psychopathe », et un expert psychiatre le considérant comme appartenant à « l’élite de la dangerosité ». Pourtant, en octobre, après plusieurs mois de délibérations, la cour a prononcé un acquittement, soulignant le manque de preuves matérielles, notamment ADN.
Cette décision représente un sérieux revers pour le parquet allemand et ouvre la voie à une sortie de prison de Brückner à partir de septembre, à la fin de sa peine relative au viol de l’Américaine. Elle fragilise également les investigations autour de la disparition de Maddie, où aucun élément probant n’a encore été découvert. De son côté, Christian Brückner nie en bloc et, dans une lettre écrite en 2023, a reproché aux enquêteurs de « créer un monstre ».