- Mardi matin, neuf têtes de cochons ont été découvertes devant des mosquées en Île‑de‑France ; une enquête a été ouverte.
- La piste d’une ingérence étrangère — très vraisemblablement russe — est privilégiée.
- Les suspects auraient quitté le territoire peu après les faits.
L’ombre du Kremlin plane sur l’affaire des têtes de cochons déposées devant des mosquées franciliennes. Mardi matin, avant l’aube, neuf têtes ont été retrouvées devant cinq mosquées à Paris et quatre en petite couronne. Sur l’une d’elles, le mot « Macron » avait été inscrit à la peinture bleue.
Le parquet de Paris indique que des « personnes de nationalité étrangère » sont suspectées et que ces actes relèvent d’une volonté manifeste de provoquer le trouble au sein de la Nation. Plusieurs éléments orientent vers la responsabilité d’acteurs extérieurs : symboles religieux ciblés, action commise de nuit et profils des auteurs évoquant une origine d’Europe de l’Est.
Un témoignage d’un éleveur normand, qui a déclaré avoir vendu des têtes de cochons à deux hommes étrangers se déplaçant dans une voiture immatriculée en Serbie, a été déterminant. La vidéosurveillance a permis de retracer le véhicule dans le quartier d’Oberkampf la veille des faits. Par ailleurs, le suivi d’une ligne téléphonique croate a attesté d’un franchissement de la frontière franco‑belge dès le mardi matin, après la commission des faits.
Contexte et chronologie
Ces actes interviennent dans un climat social et politique tendu, marqué notamment par le mouvement « Bloquons tout » et le récent changement de gouvernement. La découverte la semaine précédente d’affiches prorusses au pied de l’Arc de Triomphe donne au timing une dimension particulièrement préoccupante pour les autorités : il s’inscrit selon elles dans des campagnes de déstabilisation visant à attiser les tensions internes.
Coopération internationale
Le mode opératoire rappelle l’affaire des « mains rouges » taguées sur le mémorial de la Shoah en mai 2024. Dans ce dossier, les enquêteurs avaient rapidement établi que les auteurs étaient des ressortissants bulgares : ils avaient séjourné une nuit à Paris avant d’agir, puis pris la fuite par la Belgique. Là encore, des images diffusées en ligne avaient visé à diviser l’opinion et attiser les tensions.
Les autorités soulignent que, dès lors que les suspects passent une frontière, les délais d’investigation s’allongent mais que les procédures de coopération internationale existent pour fluidifier les échanges. La France a signé de nombreuses conventions et les pays de l’Union européenne disposent d’un protocole de coopération pour ce type d’enquêtes transfrontalières.
Dans l’affaire des « mains rouges », trois suspects seront jugés à Paris cet automne pour « dégradations en réunion en raison de la prétendue appartenance à une race, ethnie ou religion » et pour « association de malfaiteurs ». Un quatrième individu, soupçonné d’avoir organisé les réservations, est en fuite et encourt une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison.
Les enquêteurs relèvent toutefois la difficulté majeure : remonter jusqu’aux donneurs d’ordre. Il apparaît souvent que les exécutants ignorent les enjeux géopolitiques derrière leurs actes. Des précédents illustrent ce phénomène : en juin 2024, un Allemand et un Ukrainien interpellés après avoir déposé des cercueils sous la tour Eiffel affirmaient avoir été payés 400 euros; des suspects moldaves impliqués dans des tags à l’automne 2023 semblent également avoir été « employés » par une mission organisée.
Si l’ombre du Kremlin plane sur plusieurs de ces opérations, la coopération judiciaire n’est pas envisageable lorsqu’elle impliquerait des autorités réticentes à collaborer, ce qui complique encore les recherches et la possibilité d’identifier l’ensemble des commanditaires de ces actions d’ingérence étrangère.
