Si vous recherchez les victimes du prétendu « Co-Ed Killer », Ed Kemper, vous constaterez que les faits sont souvent rares dans la majorité des cas. Le site Find A Grave liste leurs noms : Edmund Emil Kemper, Sr et Maude Matilda Kemper (les grands-parents d’Ed), Aiko Koo, Alice Helen « Allison » Liu, Anita Mary Luchessa, Mary Anne Pesce, Cynthia Anne « Cindy » Schall, Sarah T. « Sally » Hallett, Rosalind Heather Thorpe, ainsi que la mère de Kemper, Clarnell Elizabeth Strandberg. À l’exception troublante de sa mère, qui l’a maltraité durant son enfance, ces vies sont presque uniquement rappelées à travers l’horreur de leur fin tragique.
En contraste frappant, la vie et les crimes de Kemper ont été minutieusement revisités pendant des décennies, avec de nombreux détails issus d’interviews directes du tueur. Par exemple, lors d’un entretien en 1984, il évoquait avoir décapité sa mère, avoir « humilié » son cadavre de manière abjecte, crié durant une heure à sa tête coupée avant de lui lancer des fléchettes. À l’image de Ted Bundy, John Wayne Gacy, Jeffrey Dahmer et d’autres tueurs en série tristement célèbres, Kemper a acquis une sinistre forme de célébrité pour ses actes inimaginables. Pourtant, s’il était interrogé aujourd’hui, il pourrait nier avoir commis nombre des actions que l’on lui attribue.

La tentative d’Ed Kemper pour réécrire l’histoire
Selon le témoignage de la professeure en psychologie légale Dr. Katherine Ramsland, spécialiste en psychologie médico-légale, et publiée dans Psychology Today, des années avant que la série Netflix Mindhunter ne ravive l’intérêt du public pour Ed Kemper, le criminel avait déjà attiré son attention avec une requête : une de ses correspondantes féminines avait contesté un article que Ramsland avait écrit à son sujet pour la chaîne Court TV. Cette dernière a donc accepté de publier les corrections proposées par Kemper.
Kemper a affirmé avoir rétracté certains aspects de ses interviews, prétendant ne pas avoir compris les motivations qui l’avaient poussé à tuer, qu’il avait auparavant qualifiées de « désir d’incarner mes fantasmes ». Il assurait n’avoir dit aux psychologues que ce qu’il pensait qu’ils voulaient entendre, et qu’il avait exagéré l’horreur de ses actes. Il a cependant introduit une contradiction dans ses propos : selon lui, il avait fabriqué des détails sauvages pour justifier sa défense mentale devant la justice, tout en fournissant également des excuses « plausibles » pour ses crimes. Il a minimisé les menaces proférées envers ses intervieweurs, qualifiant cela de plaisanterie, tout en soulignant ses « bonnes actions en prison », telles que travailler dans un hospice ou lire des livres pour les malvoyants.
Il est possible que cette nouvelle version de lui-même soit une autre illusion destinée à influencer la manière dont il sera perçu lorsque son histoire sera racontée une nouvelle fois, lui permettant de rester maître de la mémoire qu’on garde de ses victimes et de ses crimes.

