À Benfeld (Bas-Rhin), la stupeur reste vive après une attaque au couteau mercredi matin au sein du collège de la commune d’environ 6 000 habitants, située à une trentaine de kilomètres de Strasbourg. Un élève de 14 ans a blessé une professeure de musique au visage avant de prendre la fuite ; il a ensuite été interpellé et l’enseignante a été prise en charge.
« C’est tranquille normalement ici », soupire Jacky Wolfarth, maire de la commune depuis 2012. Pour l’édile, l’établissement « n’était pas à problème » jusqu’alors. Des fouilles inopinées de sacs avaient d’ailleurs été organisées avant les vacances d’été, rappelle-t-il, sans vouloir tirer de conclusions hâtives. « Faut-il renforcer les contrôles, installer des portiques ? Ce n’est pas à nous seuls de le dire, cela relève d’une réflexion nationale », ajoute-t-il.
Ce fait rappelle d’autres drames survenus dans des établissements scolaires, récemment cité en exemple dans d’autres départements. « On pense toujours que ça n’arrive qu’ailleurs jusqu’à ce que ça nous touche directement. Ici, franchement, tout le monde est étonné », confie Christiane, qui a vu ses enfants et petits-enfants fréquenter le même collège « sans souci ». « Il y avait des petites embrouilles, mais rien à côté de ce qu’il s’est passé. »
Anna, une autre habitante, évoque sa tristesse et la gravité de l’événement : « C’est triste pour l’enseignante, l’adolescent, les parents… C’est un drame irréparable. Il faut maintenant se pencher sur l’origine de tout ça, car un gamin heureux n’aurait pas fait ça. Cette violence doit s’arrêter. » Un autre riverain réclame des sanctions plus sévères : « Il faut des sanctions. Il y a déjà eu des morts ailleurs et rien ne bouge. »
« Il était souvent seul dans la cour »
Les cours ont repris jeudi, mais dans un climat lourd. Des gendarmes ont été déployés pour l’accueil des élèves, et le principal adjoint attendait les collégiens à un accès latéral. Les élèves n’ont retrouvé leurs classes qu’à 9 h, après une réunion entre la direction et les professeurs. « J’en ai vu pleurer en sortant de la salle », raconte une élève de cinquième qui assure toutefois aller « bien ». « On nous l’a demandé plusieurs fois ce matin », ajoute Amélie, soutenue par ses camarades.
Plusieurs surveillants se sont mis en arrêt de travail après l’agression, et une cellule psychologique a été mise en place au collège. À propos de l’agresseur, âgé de 14 ans et scolarisé en troisième, les témoignages évoquent un élève isolé. « Moi, j’ai des amis qui le connaissent. Il était souvent seul dans la cour, habillé tout en noir », affirme Timéo. Certains ont aussi signalé des dessins « bizarres » — croix gammées, masques à gaz — aperçus sur des tables, tandis que d’autres démentent des rumeurs sur d’éventuels complices venus « se venger ».
« Il y avait du sang qui giclait »…
Hugo*, élève de la classe de l’enseignante de musique, raconte avoir été témoin de la scène. « Ça va, mais je ne fais qu’y penser, c’était impressionnant. » Selon son récit, l’assaillant a frappé à la porte et demandé à parler à la professeure, qui s’est avancée dans le couloir. « Elle a reculé et a reçu un coup de couteau juste en dessous du visage. Elle est vite rentrée dans la classe et a crié. Il y avait du sang qui giclait par terre et sur la porte… » Les élèves, par réflexe, se sont levés et sont sortis par une autre issue, voyant l’agresseur partir en courant.
Après l’attaque, tous les élèves ont été regroupés dans une salle puis évacués vers une salle polyvalente où ils ont pu être rendus à leurs parents. Hugo précise n’avoir pas fait de crise, mais avoir vu beaucoup de camarades paniquer : « Quand j’ai appelé ma mère au téléphone, elle a pleuré. » Jeudi, seul un petit nombre d’élèves de sa classe était présent en cours, « on devait être cinq sur vingt‑cinq… ».
* Le prénom a été modifié
