La consommation de produits issus de l’agriculture biologique a connu une légère augmentation en France en 2024, avec une hausse de 0,8 %, marquant un rebond après plusieurs années difficiles liées à l’inflation. Toutefois, cette progression ne s’accompagne pas d’une augmentation des surfaces agricoles dédiées au bio, qui ont baissé pour la deuxième année consécutive, atteignant désormais seulement 10,1 % des surfaces agricoles totales. Ce chiffre est nettement inférieur à l’objectif légal fixé à 21 % d’ici 2030.
Loïc Madeline, président de la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB), explique que cette baisse s’explique par une réduction de la demande des consommateurs par rapport à la période du Covid, qui avait provoqué un véritable engouement. Par ailleurs, les dispositifs de soutien gouvernementaux ne sont pas jugés suffisants, notamment la suppression d’une aide au maintien qui s’élevait auparavant à 150 euros par hectare dans le cadre de la Politique agricole commune (PAC).
Cette aide a été supprimée avec la nouvelle PAC 2023-2027, remplacée par un éco-régime proposant un versement passant de 80 à 93 euros par hectare. Néanmoins, ce montant demeure insuffisant selon Loïc Madeline qui met en avant les surcoûts liés à la production biologique, comme une main-d’œuvre accrue de 30 % et des charges plus importantes du fait de l’absence d’engrais et pesticides.
Des besoins accrus de soutien aux agriculteurs bio
Le président de la FNAB réclame un soutien financier plus conséquent pour les exploitants bio, soulignant que cette filière souffre d’une image erronée d’une agriculture peu productive. Il rappelle que les rendements des cultures bio, notamment certaines céréales, sont proches de ceux des méthodes conventionnelles, tout en préservant la santé, l’environnement, et sans générer de coûts élevés liés au traitement de l’eau. De plus, 95 % de la production bio est consommée en France, ce qui renforce l’importance de soutenir ce secteur.
Malgré les difficultés, le nombre d’agriculteurs engagés en bio continue d’augmenter légèrement, avec un solde net positif de +1 %. Loïc Madeline estime que pour atteindre l’objectif des 21 % des surfaces agricoles en bio fixé pour 2030, il faudrait doubler les surfaces actuelles, qui s’élèvent à 2,7 millions d’hectares, en seulement cinq ans. Cela paraît ambitieux, mais reste envisageable à condition d’un engagement financier de l’État.
L’Espagne dépasse la France, l’Autriche en tête en Europe
Sur le plan européen, l’Espagne a enregistré une croissance remarquable de 12 % en 2023 sur ses surfaces bio, devançant désormais la France. L’Autriche demeure toutefois le pays européen le plus avancé avec 27,4 % de sa surface agricole cultivée en bio, bien que son étendue soit moins importante en hectares.
La directrice de l’Agence Bio, Laure Verdeau, explique que la France a principalement perdu des surfaces dans les grandes cultures, qui sont pourtant porteuses pour le développement de l’agriculture biologique en raison de leur poids dans la production française, contrairement aux cultures maraîchères qui nécessitent des surfaces moins vastes.
Par ailleurs, la viticulture, traditionnellement performante dans le taux de conversion en bio, a vu ses surfaces reculer en 2024, confrontée à des crises multiples. Tous les cheptels bio, à l’exception des brebis laitières, ont également diminué, aggravés notamment par des épizooties.
Loïc Madeline conclut en soulignant que le réinvestissement de fonds publics dans l’incitation à la création ou à la transformation de fermes en bio pourrait dynamiser la filière et favoriser son développement.
