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Une histoire profonde du 1er-Mai en France
Le 1er-Mai tire son origine d’une revendication historique datant de 1886, lancée par les syndicats ouvriers américains pour la journée de travail de huit heures. Adoptée par l’Internationale ouvrière en 1889, cette date devient peu à peu un jour férié en France après la Première Guerre mondiale. Ce cadre légal a transformé le 1er-Mai en un rendez-vous incontournable pour les mouvements syndicaux et sociaux. Selon Karel Yon, chargé de recherche au CNRS, cette tradition attire d’ordinaire les militants habituels mais peut se transformer en une mobilisation massive dès lors qu’une actualité politique brûlante s’y greffe.
Des pics de mobilisation remarquables
Au cours des 25 dernières années, plusieurs années ont été marquées par des affluences exceptionnelles lors des manifestations du 1er-Mai, notamment en 2002, 2009, 2012, 2019 et 2023. Les chiffres varient selon les sources, les syndicats ayant tendance à majorer les effectifs alors que les autorités policières les réduisent souvent. Ces pics s’expliquent par des circonstances politiques ou sociales particulières qui renforcent l’ampleur des mobilisations.
Les ingrédients d’une mobilisation réussie
Karel Yon identifie plusieurs facteurs déterminants dans la constitution d’une manifestation d’envergure. Tout d’abord, un appel unitaire et concerté des syndicats est indispensable, avec un lieu et une heure communs pour rassembler les participants. Ensuite, une actualité politique marquante doit favoriser une appropriation collective du moment, par exemple une réforme contestée ou un contexte électoral sensible.
L’unité syndicale joue un rôle clé : une intersyndicale unanime donne généralement lieu à des mobilisations d’un à deux millions de personnes, comme ce fut le cas en 2002, 2009 et 2023. En revanche, lorsque les syndicats agissent séparément, la participation est souvent limitée à quelques centaines de milliers de manifestants.
Contexte historique des grandes manifestations récentes
L’année 2002 a vu une mobilisation massive dépassant 1,3 million de manifestants, suite à l’élection de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, ce qui a suscité un large sursaut populaire. En 2009, les manifestations ont répondu aux suppressions d’emplois et fermetures d’entreprises provoquées par la crise économique de 2008. Plus récemment, en 2023, les défilés ont fait écho à une série de protestations contre la réforme des retraites portée par le gouvernement.
Le 1er-Mai 2012 s’est inscrit dans un contexte politique particulier, durant l’entre-deux-tours opposant François Hollande à Nicolas Sarkozy. Pour la première fois depuis longtemps, les syndicats ont appelé à voter contre le président sortant, dont la politique était perçue comme antisyndicale. En 2019, les manifestations ont pris un relief particulier, en s’inscrivant dans le mouvement des « gilets jaunes » qui dénonçaient la hausse du coût de la vie et les politiques fiscales jugées injustes.
Perspectives pour le 1er-Mai 2025
Pour l’année 2025, la perspective d’une mobilisation importante paraît limitée malgré la sensibilité autour du dossier des retraites. Une partie seulement des syndicats participent aux discussions avec le gouvernement, tandis que la coordination avec les mobilisations de terrain reste faible. Karel Yon évoque donc une manifestation « moyenne », en deçà de l’intensité observée en 2023.
La participation syndicale demeure stable mais faible, autour de 10 %, bien en-dessous des taux historiques de l’après-guerre qui dépassaient 25 à 40 %. De plus, le rapport avec les forces de l’ordre s’est durci, avec une doctrine de maintien de l’ordre devenue plus répressive. Cela freine la venue des familles et des manifestants non militants qui redoutent les affrontements et gazages. En conséquence, ce climat radicalise les petites minorités prêtes à l’affrontement.
