Indignation au Brésil après une critique du film ‘Je suis toujours là’

par Olivier
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Indignation au Brésil après une critique du film 'Je suis toujours là'
Brésil, France
Victoria Berne

L’indignation suscitée par « Je suis toujours là »

Une critique du film brésilien Je suis toujours là dans Le Monde a déclenché une vague d’indignation au Brésil. Le terme « monocorde », utilisé pour décrire la performance de l’actrice Fernanda Torres, a été perçu comme une insulte, révélant une sensibilité accrue autour de ce film. Entre accusations de chauvinisme français et débats sur la perception du film, cette polémique met en lumière les tensions identitaires et les aspirations d’un pays désireux de reconnaissance sur la scène internationale.

Un véritable tollé a envahi les réseaux sociaux ces derniers jours, avec des milliers d’internautes brésiliens critiquant une critique jugée trop sévère du long métrage Je suis toujours là (Ainda Estou Aqui), réalisé par Walter Salles et pressenti pour les Oscars 2025. Les plateformes du journal ont été inondées de plus de 21.600 commentaires, souvent offensants, supprimés en seulement deux jours, témoignage d’un patriotisme brésilien vibratoire et d’une sensibilisation accrue à cette œuvre.

Un film ancré dans l’histoire et les émotions

Le cinéma brésilien trouve ici un nouveau symbole. Je suis toujours là raconte l’histoire tragique de Rubens Paiva, ex-député de gauche, arrêté et assassiné par la dictature militaire en 1971. Le film se concentre sur Eunice, jouée par Fernanda Torres, l’épouse résiliente de Paiva, évoquant les horreurs du régime et les impacts dévastateurs sur sa famille.

Après ses succès aux Golden Globes et à la Mostra de Venise, ce film est devenu un phénomène culturel au Brésil, attirant 3,5 millions de spectateurs dans les salles.

Le mot « monocorde » au cœur de la polémique

C’est un simple mot, « monocorde », qui a enflammé les esprits. Dans sa critique, le journaliste Jacques Mandelbaum a qualifié la performance de Fernanda Torres de « passablement monocorde ». Cette remarque, bien que banale en apparence, a été perçue comme une offense non seulement à l’actrice mais également à la fierté nationale brésilienne. Veja, un hebdomadaire brésilien, a dénoncé ce commentaire avec un titre percutant : « L’insulte à Fernanda Torres ».

La colère s’est répandue rapidement sur les réseaux. En quelques heures, les comptes du journal français ont été assiégés par des utilisateurs désireux de défendre leur actrice et leur patrimoine culturel, avec plus de 21.600 messages en réponse, mettant en lumière l’ampleur de l’indignation collective.

Un choc culturel entre la France et le Brésil

Cette controverse va au-delà de la simple critique cinématographique. Beaucoup de Brésiliens y voient une manifestation d’une attitude condescendante envers leur cinéma, souvent marginalisé sur la scène internationale. Des accusations de chauvinisme français ont émergé, notamment sur le site Rolling Stone Brasil, certains internautes suggérant que cette critique aurait pour but de favoriser un autre concurrent aux Oscars, Emilia Pérez, de Jacques Audiard.

Cependant, cette indignation ne traduit-elle pas avant tout une fierté nationale profonde ? Selon Le Monde, Je suis toujours là est « défendu par une large partie de la société brésilienne », et cette œuvre est perçue comme une revanche culturelle après des décennies d’invisibilité. Walter Salles, précédemment connu pour Central do Brasil, revient avec un film visé pour les Oscars, confirmant ainsi son empreinte sur la scène internationale.

Cependant, certains critiques brésiliens pointent du doigt une vision trop consensuelle de la dictature. Le Monde indique que le choix de concentrer l’histoire sur une famille bourgeoise blanche de Rio, au détriment des classes populaires, a suscité des débats. Pour Eduardo Morettin, cité par O Globo, « le film transforme le destin d’une famille en une histoire universelle contre le révisionnisme historique ».

Quoi qu’il en soit, Je suis toujours là dépasse le cadre du cinéma. Entre fierté patriotique et tensions politiques, il illustre les fractures et les espoirs d’un pays, prouvant que le cinéma est un puissant vecteur de mémoire et d’identité.

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