En Ukraine, en 1943, au cœur de la tourmente de la Seconde Guerre mondiale, une prostituée décide de cacher un garçon juif de 12 ans dans le placard de sa chambre, risquant ainsi sa vie pour lui offrir un refuge face à la barbarie nazie. Ce récit poignant est porté à l’écran par Emmanuel Finkiel dans « La Chambre de Mariana », dernier volet d’un triptyque consacré à la Shoah, qui suit les films « Voyages » et « La Douleur ».
Inspiré du roman d’Aharon Appelfeld publié en 2006, le film réunit Mélanie Thierry, qui incarne la femme protectrice, et le jeune acteur ukrainien Artem Kyryk, qui interprète l’enfant caché. Ensemble, ils vivent une relation fragile et intense au milieu d’un univers marqué par la violence et la guerre incessante. Emmanuel Finkiel souligne que son œuvre s’inscrit dans la nécessité de rappeler les horreurs du passé à travers le prisme d’un monde dont la folie semble se perpétuer.
Appréhender l’époque
Le garçon dissimulé entend d’abord plus qu’il ne voit les atrocités qui l’entourent. Il est le témoin silencieux des souffrances infligées à sa protectrice, entre moments de tendresse et éclats de fureur, et porte le poids de la disparition de ses parents, dont il ne reverra jamais le visage. Le film explore ainsi le regard et la perception des événements à travers les yeux de cet enfant, invitant le spectateur à vivre avec lui cette époque sombre.
La force vitale des personnages transparaît dans ce contexte oppressant, où la menace d’une mort certaine plane constamment, intensifiant l’urgence et la fragilité de chacune de leurs interactions.
Un don de vie au cœur de la guerre
L’échange entre ces deux êtres marginalisés prend une dimension profonde de réconfort, si bien que la femme finit par offrir au garçon ce qui lui reste de plus précieux : son corps. Emmanuel Finkiel reconnaît que cette scène peut choquer à la lumière des valeurs contemporaines, mais précise que cette pulsion de vie est dictée par la situation extrême dans laquelle se trouvent les personnages. Il s’agit d’un don d’amour et de vie au milieu des morts, filmé avec une extrême pudeur et en présence de la mère de l’interprète du garçon sur le plateau, afin d’en préserver la délicatesse.
La performance de Mélanie Thierry y est remarquable, incarnant avec justesse une femme dont la destinée bascule tragiquement sous les violences des forces allemandes et russes. Ce passage bouleversant fait de « La Chambre de Mariana » bien plus qu’un simple témoignage historique : c’est un cri contre la barbarie nazie et ses résurgences contemporaines.
