Parmi les nombreuses histoires racontées sur le festival de musique et d’art Woodstock de 1969, devenu un symbole des années 60 avec leurs espoirs et idéaux, celle de Max Yasgur, l’hôte du rassemblement, demeure particulièrement marquante.
Alors âgé d’environ 50 ans, Max Yasgur était un fermier qui loua une partie de sa ferme après que le lieu initial prévu, le parc industriel Howard Mills à Wallkill, dans l’État de New York, fut indisponible. Contrairement à la légende populaire qui le décrit comme un agriculteur pacifique sensible au message de paix et d’amour du festival, sa ferme laitière était suffisamment étendue – près de 600 acres – pour qu’il ne concède qu’une portion. Son engagement ne fut pas entièrement désintéressé : il aurait perçu environ 75 000 dollars pour la location, bien que ce montant exact reste incertain.
Par ailleurs, Yasgur se situait à l’opposé du stéréotype hippie. Homme politiquement conservateur, il soutenait la guerre du Vietnam. Pourtant, il défendait fermement la liberté d’expression, même lorsque les opinions exprimées divergeaient des siennes. Il déclara ainsi au New York Times : « Si le fossé entre les générations doit se refermer, nous, les plus âgés, devons en faire davantage. » Ses voisins de Bethel, New York, s’opposèrent vivement à son choix d’accueillir le festival, allant jusqu’à le menacer physiquement ou à appeler au boycott de ses produits laitiers. Yasgur resta toutefois inflexible.
Le soutien de Max Yasgur au public de Woodstock
Malgré ses convictions conservatrices, Yasgur eut des comportements quasi hippies. Pendant la tenue du festival, plusieurs voisins tentèrent de vendre de l’eau potable à prix exorbitants aux dizaines de milliers de participants assoiffés. Indigné par la commercialisation d’un bien aussi fondamental que l’eau, Yasgur afficha une grande pancarte sur sa grange pour signaler qu’il offrait de l’eau gratuite à tous. Il distribua également du fromage, du lait et du beurre.
Le deuxième jour, il monta même sur scène devant les 500 000 personnes rassemblées, le visage rayonnant, pour déclarer : « Vous avez prouvé que les jeunes peuvent se réunir pendant trois jours, s’amuser et écouter de la musique sans autre souci ; je vous bénis pour cela ! »
Malgré ce soutien, ses voisins restèrent opposés au festival et engagèrent un procès en janvier 1970, réclamant 35 000 dollars de dommages pour les désagréments subis pendant Woodstock. La même année, Yasgur vendit sa ferme et s’installa en Floride, où il mourut d’une maladie cardiaque à 53 ans en 1973. Sa contribution exceptionnelle fut saluée par un hommage en pleine page dans Rolling Stone, une reconnaissance rare pour une personnalité non musicale.
