Algues vertes : La Bretagne doit agir pour sauver ses habitants

par Olivier
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Algues vertes : La Bretagne doit agir pour sauver ses habitants
France

Comme un cheval ou des sangliers avant lui, ce sont bien les algues vertes qui ont causé la mort de Jean-René Auffray. Ce coureur expérimenté de 50 ans avait été retrouvé sans vie le 8 septembre 2016 dans une vasière infestée d’algues vertes dans l’estuaire du Gouessant, à Hillion, dans les Côtes-d’Armor. L’autopsie initiale avait conclu à un œdème pulmonaire massif et fulgurant sans cause directement identifiée.

Un revirement majeur est intervenu lorsque la cour administrative d’appel de Nantes a reconnu que l’asphyxie de Jean-René Auffray était due aux émanations d’hydrogène sulfuré issues de la putréfaction des algues vertes. Elle a également condamné l’État à indemniser la famille du défunt.

Une reconnaissance historique

Pour Yves-Marie Le Lay, militant engagé depuis longtemps contre la pollution des algues vertes et président de l’association Sauvegarde du Trésor, cette décision est historique. Elle représente un soulagement pour la famille qui a lutté durant neuf ans pour faire reconnaître cet accident prévisible. C’est aussi l’affirmation du droit en France et notamment en Bretagne, attestant que les marées vertes peuvent être mortelles. Ce fléau, qui sévit depuis plus de cinquante ans, est la plus ancienne pollution toxique reconnue dans la région, rivalisant avec d’autres comme l’amiante. Derrière cette pollution se cache également un dysfonctionnement institutionnel de longue date.

Une pollution institutionnelle

Jusqu’à présent, personne n’osait reconnaître que les algues vertes étaient mortelles, manifestation d’une sorte d’omerta au sein des institutions bretonnes. Ce déni prédomine chez les élus locaux, conseillers et maires, qui redoutent qu’admettre la gravité de ce phénomène ne remette en cause l’économie régionale.

Le pouvoir du lobby agro-industriel

Si la condamnation vise directement l’État qui détient la puissance publique, les pouvoirs publics semblent sous l’influence du puissant lobby agro-industriel. La visite récente d’une haute responsable nationale dans la baie de Saint-Brieuc a illustré cette situation, alors qu’elle qualifiait les algues vertes de « cadeau » pour la Bretagne, une déclaration perçue comme un outrage envers les victimes. Cette vision réduit ces algues à une ressource, alors qu’elles constituent une pollution majeure. Il est essentiel de distinguer les algues utilisées à des fins économiques des algues vertes toxiques.

Poursuivre le combat

À présent que la responsabilité de l’État est reconnue, il est crucial d’identifier les véritables coupables. Parmi eux figurent les décideurs locaux ayant validé les plans de lutte inefficaces depuis quinze ans, mais aussi les chambres d’agriculture, accusées de complicité. Une plainte pour atteinte grave à la biodiversité est envisagée, notamment après la mort de sangliers dans la baie de Saint-Brieuc. En parallèle, la France est en infraction avec les directives européennes sur les nitrates, ce qui pourrait aboutir à une procédure devant la justice européenne. Dans ce contexte, des mesures drastiques, comme la réduction de 30 % du cheptel porcin à l’instar des Pays-Bas ou du Danemark, pourraient s’imposer si l’État ne prend pas lui-même l’initiative.

Changer le modèle agricole breton

Pour que la Bretagne mette définitivement un terme aux marées vertes, il est indispensable de revoir en profondeur son modèle agricole. L’élevage intensif hors-sol sur les bassins-versants des baies polluées doit cesser. Il convient également de promouvoir d’autres cultures d’avenir, telles que le lin ou le chanvre, plutôt que de persister dans une production porcine excessive. La Bretagne ne doit plus servir de poubelle agricole pour le restant de la France : 60 % du lisier français y est actuellement épandu, un chiffre intolérable pour la région et ses habitants.

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