En juin 2025, un nouveau groupe de rock nommé Velvet Sundown a commencé à diffuser sa musique sur la plateforme Spotify. Avec un son flou rappelant l’Américana classique des années 1970, ils ont rapidement accumulé une audience en ligne enviable pour tout artiste émergent. Des centaines de milliers d’auditeurs mensuels ont écouté leur premier album, Floating on Echoes, suivi deux semaines plus tard par Dust and Silence. Mi-juillet, la chanson la plus populaire du groupe, « Dust on the Wind », avait été écoutée plus de 1,5 million de fois sur Spotify uniquement.

Pourtant, dès leurs débuts, les mélomanes, critiques et sites spécialisés ont émis des doutes quant à l’authenticité de Velvet Sundown. Pourquoi les images du groupe – présenté dans sa biographie comme composé du chanteur et joueur de mellotron Gabe Farrow, du guitariste Lennie West, du claviériste Milo Raines et du percussionniste Orion « Rio » Del Mar – semblaient-elles étrangement cartoonisées, couvertes d’un filtre rétro mais perturbant ? Et comment expliquer une musique si parfaitement maîtrisée tout en étant complètement dérivée du rock des années 70 ? Malgré les assurances des relations presse du groupe et des publications sur les réseaux sociaux par ses supposés membres, il est rapidement apparu que le collectif était entièrement fictif : une création d’intelligence artificielle assemblée en quelques clics grâce à des outils génératifs audio et visuels.
La genèse du Velvet Sundown

Le premier média majeur à signaler une anomalie fut TechRadar, dont le journaliste Graham Barlow déclara que le groupe était « soit de l’IA, soit une campagne marketing très élaborée ». Pourtant, au début, Velvet Sundown s’efforçait de convaincre qu’il s’agissait d’un véritable groupe vivant. « Complètement fou que des soi-disant ‘journalistes’ continuent de promouvoir la théorie paresseuse et infondée que Velvet Sundown est ‘généré par IA’ sans la moindre preuve », écrivait le groupe sur X, ajoutant : « Aucun de ces ‘écrivains’ n’a pris contact, assisté à un concert ou écouté plus loin que l’algorithme de Spotify. » Pourtant, quand Barlow tenta d’obtenir une interview, il ne reçut aucune réponse. Parallèlement, la plateforme Deezer signala que la musique du Velvet Sundown était générée par intelligence artificielle.
Début juillet, le groupe contacta TechRadar pour affirmer que certaines publications sur les réseaux sociaux étaient des faux, brouillant davantage les pistes. Mais très vite, leurs responsables changèrent de discours, modifiant la biographie et les posts pour reconnaître officiellement que Velvet Sundown était un projet d’IA, porté par des objectifs artistiques ambitieux.
Des critiques sceptiques
« Ni tout à fait humain, ni tout à fait machine, Velvet Sundown existe quelque part entre les deux. » Ainsi commençaient les publications qui révélaient la nature artificielle du groupe. Celui-ci le présentait comme « un projet musical synthétique guidé par une direction créative humaine ». « Ce n’est pas une tromperie mais un miroir – une mise en garde artistique visant à questionner les frontières de la paternité, de l’identité et de l’avenir même de la musique à l’ère de l’IA. »
Mais ces déclarations ne convainquirent guère les critiques, lesquels voyaient surtout une supercherie. Beaucoup de mélomanes avaient découvert Velvet Sundown via des playlists automatiques de Spotify ou Apple Music – qui ne signalèrent jamais que l’artiste était généré par IA – et prirent la musique pour celle d’un véritable groupe émergent. Pour les experts, malgré un certain réalisme, la musique rock générée par IA reste bien moins captivante que celle des artistes humains. Le critique Anthony Fantano, surnommé « le nerd musical le plus occupé du web », qualifia la musique des années 70 à laquelle se réfère Velvet Sundown sur sa chaîne YouTube de « brouillon vague et plagié », précisant que c’est « comme écouter une compilation des groupes les plus ennuyeux de cette époque ». Il reste encore incertain si Velvet Sundown continuera à fidéliser une large audience, ou si les musiciens protesteront en retirant leur musique des plateformes de streaming maintenant que la vérité a éclaté.
