L’histoire tragique de Chris Farley, le clown triste de la comédie

par Zoé
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L'histoire tragique de Chris Farley, le clown triste de la comédie
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Chris Farley

Chris Farley, adoré, bruyant et débordant d’énergie, a marqué les années 1990 par son style comique unique qui captivait aussi bien les spectateurs de Saturday Night Live que les cinéphiles. Il incarnait avec brio des personnages cultes tels que Matt Foley, le coach motivationnel déjanté. Sa présence, même dans de petits rôles mémorables comme dans Wayne’s World 2 ou Billy Madison, laissait une forte impression.

Rapidement, il accéda à des rôles principaux dans des films comme Tommy Boy et Beverly Hills Ninja, donnant l’impression que ce comédien avait tous les atouts pour devenir une véritable star du cinéma comique. Pourtant, son parcours fut brutalement interrompu. Comme le relatait Biography, Chris Farley est décédé le 18 décembre 1997, à seulement 33 ans.

Malgré sa popularité, son humour contagieux et son excentricité publique, Farley incarnait en de nombreux aspects le triste archétype du clown mélancolique. Sa vie personnelle était marquée par de profondes souffrances qu’il affrontait souvent de manière autoc destructive, engendrant des turbulences tant dans l’ombre des coulisses que parfois en pleine lumière. Quelles furent les raisons de ces troubles et comment expliquer une fin aussi prématurée et déchirante ?

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Adam Sandler et Chris Farley sur le plateau de Saturday Night Live

Chris Farley a connu une ascension fulgurante en intégrant la troupe de Saturday Night Live (SNL) dès 1990. Rapidement, sa personnalité explosive et son humour décalé ont conquis le public, faisant de lui une figure incontournable du célèbre show humoristique.

Pourtant, cette période dorée s’est brutalement interrompue en 1995, lorsqu’il fut limogé, tout comme son meilleur ami et collègue, Adam Sandler. Ce double départ reste une étape marquante et douloureuse dans leur carrière respective. Dans une interview accordée en 2017, Sandler évoque ce moment comme une sortie simultanée : « On a un peu quitté le show en même temps qu’on s’est fait virer. C’était la fin de notre aventure. Le fait que nous ayons été licenciés ? Qui peut dire pourquoi. »

Malgré la souffrance engendrée par ce licenciement, cette rupture a aussi ouvert de nouvelles portes pour les deux artistes. Adam Sandler souligne l’impact majeur de Chris Farley sur la scène de SNL en le qualifiant de « présence la plus forte que j’ai jamais vue ». Leur complicité et leur talent ont marqué à jamais l’histoire du divertissement américain.

Chris Farley

En 2015, lors d’une émission spéciale, plusieurs humoristes, dont Adam Sandler, Lena Dunham et Maria Bamford, ont évoqué leurs tics liés au trouble obsessionnel compulsif (TOC). Adam Sandler a révélé une particularité singulière de son ami Chris Farley : une compulsion obsessionnelle peu commune, celle de lécher les objets.

Sandler raconte que, où qu’ils aillent, Chris Farley ressentait le besoin irrésistible de lécher tout ce qui se trouvait sur son chemin. Un jour, alors qu’ils se dirigeaient vers un dîner, Farley s’est soudainement arrêté en plein milieu de la rue et a demandé à Sandler un instant avant de courir en arrière pour lécher une boîte aux lettres, puis retourner auprès de son ami comme si de rien n’était.

Dans le livre The Second City Unscripted de Mike Thomas, plusieurs personnes ayant côtoyé Farley à l’époque de ses débuts au théâtre comique de Chicago témoignent également des symptômes marqués de TOC qu’il présentait. Parmi ses habitudes, on compte le fait de toucher murs et escaliers, embrasser les horodateurs, lécher les coulisses, ainsi que l’exécution de rituels complexes impliquant sa ceinture.

John Rubano, un collègue comédien, a même confronté Farley au sujet de ces comportements atypiques. Farley s’est alors contenté de se retourner et de partir sans dire un mot, illustrant la lutte intérieure discrète du comédien face à ce trouble.

Les difficultés de Chris Farley avec l’addiction

Chris Farley

La vie de Chris Farley fut souvent tumultueuse, largement marquée par son penchant pour l’alcool et les drogues. Selon Rolling Stone, à l’époque de son décès prématuré le 18 décembre 1997, il avait longtemps lutté contre une consommation importante de cocaïne, héroïne, marijuana et champignons hallucinogènes, en plus de son alcoolisme et de son comportement compulsif lié à la nourriture.

Bien que Chris Farley ait accumulé de nombreux vices, il était pleinement conscient de ses faiblesses et s’efforçait régulièrement de reprendre le contrôle. Il participa à des groupes tels que Overeaters Anonymous et Alcoholics Anonymous, enchaînant cures de désintoxication et séjours en centres spécialisés pour perdre du poids. D’après Entertainment Weekly, durant ses deux dernières années, il fit pas moins de 17 séjours en centre de réhabilitation, expérimentant divers programmes et méthodes de sevrage.

Il fréquenta notamment le centre de désintoxication Hazelden à plusieurs reprises, au point qu’un de ses amis déclara que ce centre aurait dû nommer une aile en son honneur. Malgré ces multiples tentatives pour s’en sortir, rien ne parvint à endiguer durablement ses rechutes, et le comédien sombrait encore et encore dans ses dépendances.

Chris Farley

Chris Farley, célèbre pour son humour énergique et physique, ne doit pas cette agilité à un simple hasard. En effet, dès ses années scolaires, il s’était distingué comme un athlète talentueux, malgré son corpulence imposante. Selon un article de Rolling Stone de 1998, ses performances sportives étaient remarquables. Excellent nageur et joueur de football, Farley était un pilier défensif au sein de son équipe locale, reconnu comme un All-City lineman défensif.

Cependant, ses espoirs d’atteindre le niveau professionnel ont rapidement été freinés. Mesurant 1,75 m pour environ 104 kilos, sa stature, bien que puissante, ne correspondait pas aux exigences des grandes ligues. Ce revers lié à sa taille l’a forcé à repenser son avenir.

Face à cette déception, Chris Farley a trouvé une autre voie pour donner un sens à sa vie. Toujours en butte aux moqueries de ses camarades, il a appris à se moquer de lui-même, transformant cette attitude en un mécanisme de défense. Inspiré par son idole John Belushi, Farley a choisi de faire de la comédie son nouveau « sport de contact ». Le travail physique qu’il avait accompli lors de sa carrière sportive s’est avéré précieux pour développer son style comique, caractérisé par des performances très physiques et dynamiques.

Peu surprenant, le producteur emblématique de Saturday Night Live, Lorne Michaels, décrivait Farley comme un athlète capable de « savoir utiliser son corps » et même de « jouer malgré la douleur ». Cette combinaison unique d’athlétisme et d’humour a façonné le personnage inoubliable que les fans continuent d’admirer.

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Chris Farley aux Oscars

Chris Farley a longtemps été stigmatisé en raison de son poids. Lors d’une interview avec Erik Hedegaard de Rolling Stone, le comédien a révélé avoir été victime d’intimidations durant son enfance. Il racontait régulièrement les surnoms humiliants que ses camarades lui lançaient, tels que « Fartley », « Lard Ass », « Tubby » ou encore « Fatso ». Pour Farley, la comédie est devenue un mécanisme de défense essentiel, lui permettant de tourner en dérision son propre corps avant que d’autres ne le fassent.

Malgré la célébrité et l’âge adulte, les remarques blessantes ne l’ont pas toujours épargné. Certaines moqueries n’étaient pas uniquement liées à son poids. Par exemple, lors des Oscars, Larry Flynt, le fondateur du magazine Hustler, lui avait lancé cette pique cinglante : « Ça fait plaisir de voir quelqu’un réussir qui n’a pas traversé toute la puberté ». Farley, loin d’être impressionné, se souvint avoir simplement pensé : « Eh bien, va te faire voir, idiot ! »

Chris Farley lors d'une remise de prix

Chris Farley souffrait d’une maladie cardiaque grave appelée athérosclérose. Selon Colin Bertram de Biography, cette condition a été considérée par les autorités comme un « facteur contributif important » de son décès. L’Institut National du Cœur, des Poumons et du Sang rappelle que cette maladie n’est pas à prendre à la légère : elle provoque l’accumulation de graisses, de calcium et d’autres substances dans les artères, formant ce que l’on appelle des plaques. Cette accumulation entrave progressivement la circulation sanguine, réduisant le flux de sang riche en oxygène vers le corps.

Les conséquences peuvent être graves, allant des accidents vasculaires cérébraux aux crises cardiaques, voire au décès. Ce diagnostic souligne la complexité des problèmes de santé qui touchaient Farley, bien au-delà de sa personnalité énergique sur scène.

Chris Farley n’est malheureusement pas le seul célèbre à être parti prématurément en raison de l’athérosclérose. Par exemple, Whitney Houston, une autre icône marquée par la lutte contre ses addictions, souffrait également de cette maladie. Lors de son décès en 2012, le chef des médecins légistes du comté de Los Angeles a déclaré que la cause principale était une « noyade due à une maladie cardiaque athéroscléreuse aggravée par la consommation de cocaïne ».

Chris Farley

Malgré son immense talent et son humour indéniable, Chris Farley cachait un mal-être profond. Selon Emily Bicks du site Heavy, son succès ne suffisait pas à apaiser ses nombreuses insécurités. Farley était très mal à l’aise avec son poids et craignait secrètement de perdre son côté comique, une peur qui l’assaillait régulièrement.

Dans une interview accordée à Erik Hedegaard pour Rolling Stone, le comédien s’est confié sur ses angoisses, révélant qu’il était « toujours terrifié ». Son comportement souvent exubérant était en fait une réaction à sa peur des autres. Il redoutait profondément que ses films ne rencontrent pas le succès et que cela mette fin à sa carrière d’acteur.

Parmi ses sources d’angoisse figuraient aussi la pression de plaire aux dirigeants des studios, la crainte de perdre du poids au point de ne plus être drôle, et même le moment après avoir raconté une blague réussie. Pour lui, le silence qui suivait le rire était « le silence le plus terrifiant que l’on puisse entendre ».

Ces lourds fardeaux d’insécurité pesaient sur un homme constamment sous les projecteurs. Par ailleurs, ses peurs ne se limitaient pas à sa vie professionnelle. Certaines s’étendaient à des préoccupations religieuses, tandis qu’il redoutait aussi de ne jamais pouvoir fonder une famille avec une femme qui lui conviendrait.

Chris Farley et David Spade

Dans le documentaire I Am Chris Farley, le comédien Mike Myers évoque ses débuts en improvisation avec Farley au sein du célèbre club de comédie de Chicago, Second City. Il souligne que Chris Farley était connu pour son tempérament parfois violent, au point de représenter un danger physique potentiel pour ses collaborateurs. Myers confie même avoir eu très peur, rappelant que Farley avait déjà fait tomber une dent à quelqu’un ou laissé une cicatrice à un autre simplement à cause de sa nature déchaînée.

Farley a fini par intégrer Saturday Night Live (SNL) et conquérir un large public, mais cela n’a pas forcément rendu ses collègues plus en sécurité. En 2016, lors d’une interview, Adam Sandler a révélé qu’à une occasion, Farley avait menacé de frapper son ami proche et camarade de scène, David Spade. Ce dernier, inquiet, a pris soin de rester hors de portée pendant plusieurs jours, même si Farley avait minimisé la menace en la qualifiant de plaisanterie dans un message vocal.

Lors d’une autre apparition, David Spade a raconté que les tensions avaient atteint un nouveau sommet pendant le tournage du film Tommy Boy. Farley rancunait le fait que Spade ait profité de son sommeil pour aller boire un verre avec Rob Lowe. Sa vengeance fut brutale : il s’est approché et a écrasé la main de Spade avec sa botte. Ce dernier lui a répondu en lui lançant un soda dessus, déclenchant un affrontement digne d’une scène dramatique de télé-réalité. L’escalade a culminé quand Farley l’a violemment poussé dans un escalier, et malgré la violence de l’incident, la caméra a tourné en plein « Action ». Cette anecdote illustre parfaitement le côté à la fois comique et tragique de la personnalité de Chris Farley.

Chris Farley

Le frère de Chris Farley, John, a retrouvé le comédien décédé dans son appartement à Chicago le 18 décembre 1997. Selon les informations rapportées, le corps de Farley présentait des traces de cocaïne, de morphine et de marijuana. Par ailleurs, il souffrait d’une maladie cardiaque avancée qui avait provoqué une accumulation dans ses artères. La cause officielle de sa mort est une overdose de drogue.

Peu de temps avant son décès, Farley avait brièvement séjourné dans un centre de désintoxication à Minneapolis. Pendant quelques jours, il menait une vie plutôt calme, assistant à la messe régulièrement et préparant les fêtes de fin d’année, notamment en cuisinant des biscuits de Noël et en décorant son sapin. Son amie Jillian Seely évoque son enthousiasme pour un film à venir, Almost Heroes.

Cependant, cette période apaisée fut de courte durée. À partir du 14 décembre, Farley fréquenta plusieurs bars de la ville, en compagnie de plusieurs femmes, tout en consommant d’importantes quantités d’alcool et de drogues. Selon The Chris Farley Show, une biographie co-écrite par Tanner Colby et Tom Farley, frère du comédien, les derniers instants de Chris se seraient déroulés en compagnie d’une call-girl. Celle-ci aurait volé sa montre, pris des photos de lui effondré sur le sol de son salon, puis serait partie après avoir laissé un mot.

Chris Farley est décédé seul, ses derniers mots ayant été : « Ne me laisse pas ».

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Chris Farley dans Beverly Hills Ninja

Il serait inexact de dire que Chris Farley n’a pas connu le succès ou la popularité. Il a assurément été l’un et l’autre. Pourtant, un rapide coup d’œil à sa filmographie révèle qu’à la différence de son idole John Belushi, dont les rôles dans Animal House et Blues Brothers ont marqué l’histoire du cinéma, Farley n’a jamais eu ce rôle phare qui aurait véritablement cimenté sa légende sur grand écran.

À son actif, on retrouve certes des rôles marquants dans Tommy Boy ou Beverly Hills Ninja, mais aucun véritable rôle emblématique à la hauteur de son énorme potentiel comique. Sa carrière aurait sans doute pu s’inscrire dans une tout autre dimension s’il avait eu un peu plus de temps ou de chance.

En 2012, Bradford Evans a étudié plusieurs rôles que Chris Farley n’a jamais eu l’opportunité d’incarner. Parmi ceux-ci figurent des personnages dans The Cable Guy et Kingpin, attribués respectivement à Jim Carrey et Randy Quaid. Toutefois, les rôles les plus prometteurs sont ceux qu’il n’a pas pu jouer en raison de son décès prématuré.

Farley aurait dû tenir un rôle majeur dans Ghostbusters III, un projet finalement abandonné. Il envisageait également de jouer dans l’adaptation cinématographique de A Confederacy of Dunces. De plus, il avait rencontré le scénariste David Mamet pour un rôle sérieux dans un biopic sur Fatty Arbuckle, marquant une volonté de s’éloigner parfois de la comédie.

Enfin, selon CNN, Chris Farley avait été choisi à l’origine pour prêter sa voix au personnage principal du film d’animation Shrek. Il avait même enregistré presque toutes les répliques de l’ogre avant son décès, laissant planer un « et si » poignant pour les fans et l’industrie du divertissement.

Chris Farley entouré de sa famille et de ses collègues

Les multiples addictions de Chris Farley n’ont pas surpris ses proches ni le public, surtout dans les dernières années de sa vie. Erik Hedegaard de Rolling Stone rapporte qu’un chroniqueur qualifiait sa disparition de « décès prématuré le moins surprenant dans l’histoire des célébrités du show-business ».

Cependant, de nombreux efforts ont été faits pour tenter de le sauver. Ses amis d’enfance, sa famille et ses collègues, notamment son patron du Saturday Night Live, Lorne Michaels, ainsi que des acteurs comme Dan Aykroyd, David Spade ou Tom Arnold, sans oublier son propre manager, ont tout essayé pour le convaincre de freiner ses excès. Mais ni les conseils avisés ni les cures de désintoxication n’ont réussi à l’aider durablement, et il retombait toujours dans ses anciens travers.

Ces derniers moments difficiles sont poignamment décrits par son amie Jillian Seely, qui évoque une lutte vaine : « Je sais qu’il voulait devenir sobre, mais c’était comme s’il avait un cancer et que la chimiothérapie ne fonctionnait plus. »

Une chose semblait pourtant fonctionner pour Chris Farley : le travail. L’acteur lui-même reconnaissait que lorsqu’il tournait, il n’avait pas d’autre choix que de rester sobre. Les studios, soucieux de protéger leur investissement, s’assuraient qu’il restait discipliné. Ainsi, lors du tournage du film Almost Heroes, sa présence aux réunions quotidiennes des Alcooliques Anonymes était obligatoire. Pour le doublage de Shrek, la surveillance était encore plus stricte, le suivant jour et nuit.

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