Les tensions entre les membres de Fleetwood Mac nourrissent les légendes du rock. Entre amours tourmentés et ruptures acrimonieuses, le groupe puisait son énergie créative dans ces bouleversements. Lorsque la formation iconique s’est réunie pour enregistrer son troisième album, Stevie Nicks était déjà devenue une figure emblématique du paysage musical, sa sensibilité et son univers fantasmagorique ayant façonné l’époque. Mais le nom choisi pour le nouvel opus ne lui plaisait pas du tout.

Stevie Nicks jugeait le titre Tusk irrespectueux pour plusieurs raisons
Le tournant de l’enregistrement fut long et éprouvant. Stevie Nicks avait apporté au disque certaines de ses plus belles compositions — des titres comme Sara, Angel et Beautiful Child — qui allaient devenir des favorites des fans. L’album était pensé comme une double galette, un mélange d’énergie rock et d’expérimentations sonores qui s’éloignaient du son propre au groupe. Les tensions entre les membres se faisaient sentir et la sensibilité de Nicks la rendait particulièrement vulnérable.

Pourquoi ce choix était-il problématique pour elle? Dans une interview publiée par Mojo, Nicks expliqua que le mot semblait peu élégant et brutal, peut-être inspiré par les défenses décorant le studio où le groupe travaillait, évoquant une cruauté animale et l’ivoire. Mais lorsque l’on apprit une autre explication possible — que le terme pouvait faire référence aux parties privées du batteur Mick Fleetwood — son déplaisir se transforma en dégoût. À l’époque, Nicks et Fleetwood entretenaient une liaison au début de l’enregistrement, ce qui rendait cette référence d’un goût encore plus déplacé.
Cette double lecture faisait monter d’un cran le malaise de la chanteuse, et l’épisode illustre les tensions qui entouraient la création du disque.

Malgré sa réticence, l’album fut bel et bien baptisé Tusk et sortit sous les yeux d’un public curieux. La réception fut tiède: on s’attendait peut-être à Rumors II, mais on découvrait un ensemble hétéroclite où l’ADN du groupe cohabitait avec des expérimentations sonores qui ne ressemblaient guère à leurs précédents succès. Ces choix audacieux démontraient toutefois que le groupe pouvait prendre des risques et explorer de nouvelles directions.
Quarante-cinq ans plus tard, les fans passionnés et les experts reconnaissent les enjeux et le caractère audacieux de Tusk. Buckingham a ouvert la voie à des territoires inexplorés et a poussé les autres à sortir des sentiers battus. Les textes et les performances demeurent solides, notamment les études intemporelles de Nicks sur l’amour et la perte, et l’étrangeté présente sur les disques est devenue une caractéristique marquante du son du groupe dans un paysage musical en mutation. Le titre est devenu culte et, malgré l’allusion explicite, l’album s’est vendu à près de quatre millions d’exemplaires.
Il demeure fascinant de se demander ce que Nicks aurait proposé comme titre alternatif; l’histoire aurait peut‑être pris une autre tournure. Le mystère persiste et rappelle les tensions créatives qui ont marqué Fleetwood Mac à l’époque.
En définitive, Tusk demeure un pilier du catalogue et un témoignage des choix artistiques audacieux d’un groupe qui n’a pas hésité à s’éloigner des recettes établies. Son impact s’est renforcé avec le temps, et son récit continue d’intriguer les fans et les curieux du rock audacieux.

