Pourquoi les ventilateurs de plafond peinent à séduire en France

par Olivier
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Pourquoi les ventilateurs de plafond peinent à séduire en France
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Portrait de Mathilde Durand

Aux États-Unis ou dans les territoires ultramarins, les ventilateurs de plafond sont largement utilisés, mais en France, leur image reste désuète, souvent considérée comme « la climatisation du pauvre ». Pourtant, ces brasseurs d’air, plus écologiques et économiques, connaissent un regain d’intérêt, notamment grâce aux nouvelles normes de construction.

Le ventilateur de plafond est un classique du cinéma : un bar texan, une véranda sous les tropiques, une chaleur accablante et un ventilateur tournant lentement au plafond. Cette image, un peu kitsch, correspond pourtant à un équipement très répandu dans de nombreux pays, notamment en Asie du Sud-Est et aux États-Unis où l’utilisation dépasse 60 %. En France métropolitaine, l’adoption reste timide. Pourquoi ?

« C’est très culturel », explique Patrice Wolff, dirigeant de Turbobrise et trésorier de l’Association française des professionnels des ventilateurs de plafond (AFPVP). « Beaucoup associent le ventilateur à un appareil de mauvaise qualité, bruyant. En métropole, on est passé d’une époque où l’on ouvrait simplement les fenêtres, à une situation où la climatisation est devenue la norme. »

Claude Pichegru, gérant de Guibb et secrétaire de l’AFPVP, renchérit : « La climatisation était un marqueur social, tandis que le ventilateur faisait figure de solution économique, voire démodée. »

Une solution adaptée aux territoires ultramarins

Si en métropole les ventilateurs de plafond peinent à s’imposer, la situation est très différente dans les territoires ultramarins. Leur taux d’utilisation atteint entre 30 et 40 % selon l’AFPVP. Ces régions, non interconnectées électriquement, ne peuvent pas facilement importer d’électricité, ce qui rend les économies d’énergie indispensables.

Robert Célaire, ingénieur bioclimaticien, souligne que le retour des brasseurs d’air en France est largement impulsé par ces départements d’outre-mer. Il dénonce également l’influence du « lobby de la climatisation » sur la faible diffusion des ventilateurs. Il est coauteur d’un guide détaillant comment intégrer le brasseur d’air dans une construction pensée pour le climat.

« Nous sommes dans une aliénation énergétique : les bâtiments sont mal conçus, alors on est obligé d’utiliser le chauffage en hiver et la climatisation en été », regrette-t-il. Depuis plusieurs années, il collabore avec des architectes pour créer des constructions bioclimatiques équipées de ventilateurs de plafond et de protections solaires comme des volets.

Par exemple, dans le nouvel hôtel de police de Cayenne, en Guyane, le choix s’est porté uniquement sur des brasseurs d’air, car les policiers refusaient la climatisation.

Un retour encouragé par les nouvelles normes

Face à l’intensification des canicules, le ventilateur de plafond tend à revenir dans les logements. Son installation est favorisée par la réglementation énergétique et environnementale RE 2020 qui s’impose aux constructions neuves. Depuis décembre, les brasseurs d’air plafonniers bénéficient aussi d’un taux de TVA réduit à 5,5 %.

Pierre Lacarrière, président de l’AFPVP, observe une évolution : « Nous équipons désormais de nombreux logements collectifs, Ehpad, crèches, mairies et écoles. Tout le monde recherche des solutions moins énergivores. Seul ou en complément de la climatisation, le ventilateur de plafond offre une alternative intéressante. »

Sur le pourtour méditerranéen, notamment entre Perpignan, Montpellier et Nice, les ventilateurs de plafond apparaissent de plus en plus dans les nouvelles constructions des promoteurs immobiliers.

La demande s’élargit désormais à d’autres régions comme Rennes, Lyon, l’Île-de-France, le Sud-Ouest ou encore l’Est. Les modèles se diversifient en style : pâles en bois vintage, ventilateurs connectés avec éclairage LED, ce qui contribue à transformer l’image du ventilateur en un objet design, écologique et « un peu bobo, une alternative cool à la climatisation » selon Robert Célaire.

« Les gens redécouvrent que le vélo en ville, plutôt que la voiture, est une évidence écologique. Le ventilateur de plafond offre un service similaire : il est efficace à moindre coût écologique, économique et sanitaire, à condition que le bâtiment soit adapté. Il faut parfois du temps pour que cette évidence s’impose », conclut l’ingénieur.

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