Comment Hawaï a vécu la pénurie de 1971
Dans les printemps 1971, une grève qui immobilisa tous les quais de la côte Ouest des États-Unis a brutalement interrompu les approvisionnements maritimes vers Hawaï. Privée de cargaisons essentielles — riz, sel, et surtout papier toilette — la population se retrouva face à une pénurie qui dura plusieurs mois et révéla des comportements sociaux inattendus.
Les effets n’étaient pas limités à quelques livraisons manquées : la rareté du papier toilette transforma un produit banal en bien de première nécessité, puis en symbole social. La situation fit dériver les usages et les normes publiques, forçant commerces et institutions à s’adapter rapidement.
Parmi les réponses observées, on nota notamment :
- Le vol répété de rouleaux dans les bars et les toilettes publiques, au point que les gérants durent cacher leurs réserves et restreindre l’accès.
- La mise en place d’un rationnement strict dans certains établissements : les visiteurs se voyaient attribuer un nombre limité de carrés par visite.
- La présence de gardiens dans des toilettes publiques pour éviter les larcins.
- La transformation du papier toilette en objet de statut : on le gagnait comme prix de radio, on l’offrait en cadeau pour des pendaisons de crémaillère, et sa possession devenait anecdotiquement enviable.
Les anecdotes abondent : on raconte qu’un maire se rendit au magasin en pleine nuit pour se procurer des rouleaux et du riz, en échange d’un service rendu. Ces épisodes illustrent à la fois l’urgence matérielle et l’ampleur de la panique collective face à la pénurie de papier toilette.
Avec le temps, les circuits d’approvisionnement furent rétablis et la vie reprit son cours, mais la mémoire de cette crise resta vive. Des menaces de perturbation similaires, à la fin des années 1990 et au début des années 2000, suffirent parfois à provoquer des ruées vers les magasins, signe que l’expérience de 1971 gardait une forte résonance sociale.