Acteurs et influenceurs : un rapport complexe à l’image

par Olivier
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Acteurs et influenceurs : un rapport complexe à l'image
France

Dans L’Accident de piano, une comédie signée Quentin Dupieux, trois acteurs font leurs débuts : Sandrine Kiberlain, Jérôme Commandeur et Karim Leklou. Ils entourent Adèle Exarchopoulos, qui incarne Magaloche, une influenceuse cherchant à se faire oublier après avoir commis une grosse erreur susceptible de la propulser en « faits divers ». Ce film offre l’opportunité de décrypter le rapport complexe des acteurs aux réseaux sociaux et à l’univers des influenceurs.

Karim Leklou souligne la distinction nette entre leur réalité et celle des influenceurs. « La frontière entre ce qu’est Magaloche et la vraie Magalie est plus floue que celle qui nous sépare des personnages que nous incarnons », explique-t-il. Dans le film, il joue un fan acharné de Magaloche, prêt à tout pour décrocher un selfie, avant de l’abandonner dès l’obtention de sa photo, témoignage d’un phénomène que l’acteur a rarement expérimenté.

Un monde à part

Sandrine Kiberlain appuie ce constat, précisant que la proximité entre influenceurs et abonnés est singulière : « Les gens gardent une distance. Je peux faire mes courses à visage découvert parce que je sais que je serai davantage reconnue si je tente de me cacher ». Dans le rôle d’une journaliste tenace, elle s’emploie à dénicher des révélations sur la vie de Magaloche.

Jérôme Commandeur dédramatise sa propre notoriété, évoquant l’idée reçue qu’il est constamment sollicité. « Pour les influenceurs, c’est différent, car les abonnés croient les connaître après seulement quelques échanges ». En incarnant le manager de Magaloche, il illustre les tensions liées à la gestion de l’image, entre exploitation et protection face à un univers où chacun revendique des droits sur la personne publique.

Une compétition inquiétante

Chacun des trois artistes gère ses réseaux à sa manière. Jérôme Commandeur confesse une période où cette pression lui donnait un sentiment de mal-être, en raison de comparaisons incessantes. Sandrine Kiberlain, dont la carrière débuta avant l’ère digitale, décrypte l’évolution de leur usage : d’un simple partage esthétique à une exigence d’interaction plus stratégique.

Karim Leklou souligne la montée en puissance du besoin d’approbation généralisée, à travers le concept même de « liker ». « C’est une forme de violence nouvelle à laquelle il faut apprendre à se préserver, surtout pour les plus jeunes ». Le trio alerte également sur le fait que le nombre d’abonnés influence désormais le choix des acteurs par les directeurs de casting.

La question de l’intelligence artificielle

Sandrine Kiberlain compare l’univers des réseaux sociaux à une immense cour de récréation où s’opposent populaires et exclus, auteurs et victimes de harcèlement. Elle met en garde contre le jugement simpliste des individus uniquement sur la base de leurs publications, ce qui peut marginaliser ceux qui ne partagent pas leur vie en ligne.

Karim Leklou ajoute que la quête effrénée de notoriété et de possessions peut conduire à un mal-être infondé. Sa philosophie : accumuler moins pour mieux vivre. Jérôme Commandeur pointe l’importance nouvelle de l’intelligence artificielle qui s’approprie nos images sans contrôle, alimentant des contenus vidéos dont on ignore parfois qu’on en est la source. Ce phénomène marque une perte croissante de maîtrise sur son image personnelle.

Face à ces enjeux, aucun des trois ne prétend détenir une solution. Sandrine Kiberlain avoue son soulagement d’être comédienne sans la pression qui pèse sur les influenceurs, renforçant ainsi le caractère visionnaire de L’Accident de piano.

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