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Tout au long du XXe siècle, Columbia Pictures s’est imposée comme l’un des studios phares des sitcoms, offrant souvent une vision décalée et comique des aléas de la vie domestique. Parmi ces créations, Bewitched se distingue particulièrement. Conçue par Sol Saks, cette série télévisée diffusée de 1964 à 1972 relate les aventures de Samantha, une jeune sorcière incarnée par Elizabeth Montgomery, capable d’accomplir des miracles d’un simple clignement de nez.
Malgré les réticences de sa mère Endora, interprétée par Agnes Moorehead, Samantha tombe amoureuse d’un homme ordinaire, Darrin Stephens, un cadre publicitaire incarné d’abord par Dick York puis par Dick Sargent. En se mariant, elle promet de limiter l’usage de ses pouvoirs magiques pour préserver leur vie de couple. Pourtant, cette promesse est difficile à tenir, surtout lorsqu’elle utilise sa magie pour résoudre les problèmes du quotidien. Parfois, ses enchantements provoquent des catastrophes encore plus grandes, mais chaque épisode se conclut sur une réconciliation entre Samantha et Darrin, témoignant d’une meilleure compréhension mutuelle.
Cette série emblématique a su captiver des générations, mêlant humour et fantastique avec élégance. Si Bewitched a su jeter son sort sur vous, explorez davantage son histoire fascinante pour découvrir des anecdotes et détails méconnus qui enrichissent ce feuilleton charmant et intemporel.
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L’idée de la série Bewitched ne surgit pas soudainement dans l’esprit du scénariste Sol Saks, ni par un tour de magie. En fait, selon l’encyclopédie des fans Bewitched Harpies Bizarre, Saks puisa son inspiration pour créer ce sitcom en regardant le film I Married a Witch, une comédie romantique originale tournée pendant l’Âge d’or d’Hollywood.
Comme le précise Turner Classic Movies, I Married a Witch est une adaptation du roman de Thorne Smith de 1941 intitulé The Passionate Witch. Ce film de 1942, réalisé par le cinéaste français René Clair, raconte l’histoire de Jennifer, une sorcière vivant dans le New England du XVIIe siècle. Après avoir été condamnée au bûcher à Salem, elle jure de se venger de ceux qui ont ordonné son exécution.
Des siècles plus tard, son esprit est libéré par inadvertance, lui permettant de parcourir à nouveau la Terre. Jennifer s’intéresse alors à un homme politique local nommé Wallace Wooley. L’intrigue se complique lorsqu’elle découvre que cet homme parfait est un descendant direct de ceux qui ont causé sa mort. Au fil du récit, la force de l’amour triomphe de leurs différends ancestraux.
Dans ce film culte, la légendaire Veronica Lake incarne Jennifer, tandis que Fredric March, lauréat d’un Oscar, joue son amant ainsi que tous ses ancêtres.

La création de Bewitched puise ses racines dans plusieurs inspirations théâtrales et cinématographiques. Parmi elles, la pièce de Broadway de 1950, Bell, Book and Candle, écrite par John Van Druten, a particulièrement influencé Sol Saks, le créateur de la série. Cette pièce, portée sur scène par Lilli Palmer et Rex Harrison, raconte l’histoire de Gillian Holroyd, une sorcière moderne qui rencontre Shepherd Henderson, un jeune éditeur séduisant.
Attirée par Shepherd, Gillian jette un sort pour le charmer, et les deux vivent une liaison passagère. Cependant, un ancien règlement impose aux sorcières de renoncer à leurs pouvoirs si elles tombent amoureuses. Face à ce dilemme, Gillian choisit l’amour, sacrifiant sa magie pour être aux côtés de Shepherd. Cette intrigue s’est également déclinée au cinéma en 1958, avec Kim Novak et James Stewart dans les rôles principaux, incarnant un couple aussi charismatique que complexe.
Tandis que Bewitched partageait cette prémisse avec Bell, Book and Candle et I Married a Witch, un autre récit ayant captivé Sol Saks, les questions de droits d’auteur ne le préoccupaient guère. En effet, Columbia Pictures, via sa filiale Screen Gems, détenait déjà les droits sur les adaptations cinématographiques, assurant ainsi une légitimité à cette fusion d’influences. Ce mélange subtil d’histoires permet à Bewitched de s’inscrire dans une tradition culturelle riche, tout en offrant un univers unique qui a enchanté le public pendant des décennies.
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Les fans de Bewitched ont toujours adoré la complicité et la chimie qui existaient entre Samantha, incarnée par Elizabeth Montgomery, et son mari à l’écran, Darrin. Cette alchimie prenait également racine dans la vie réelle : Elizabeth Montgomery était mariée à William « Bill » Asher, l’un des producteurs de la série.
Le couple s’est rencontré sur le tournage du téléfilm Johnny Cool en 1963, où Montgomery tenait le rôle principal et Asher assurait la réalisation. Selon la biographie de Herbie J. Pilato, Twitch Upon a Star: The Bewitched Life and Career of Elizabeth Montgomery, ils se sont alors sentis attirés l’un par l’autre, même s’ils venaient tous deux de traverser des ruptures importantes avec d’autres personnalités du monde du spectacle.
Lorsque les producteurs William Dozier et Harry Ackerman ont commencé à travailler sur Bewitched, Montgomery et Asher avaient déjà consolidé leur relation et formaient un couple heureux. Dozier, ami de longue date d’Elizabeth Montgomery, souhaitait depuis un moment collaborer avec elle. Après que l’actrice Tammy Grimes ait refusé le rôle de Samantha, Dozier a proposé ce rôle à Montgomery, qui l’a accepté avec enthousiasme. Par la suite, Asher est rejoint la série en tant que réalisateur avant de devenir producteur à plein temps.
Elizabeth Montgomery a vécu trois grossesses au cours de la série Bewitched, un fait méconnu qui a profondément influencé le développement du scénario. Lors de la première saison, elle était enceinte de son premier fils avec Bill Asher, William. Étant donné que son personnage venait juste de se marier, les producteurs ont choisi de dissimuler sa grossesse grâce à des vêtements adaptés et des angles de caméra ingénieux, préservant ainsi la continuité de l’intrigue.
Lorsque Montgomery attendait son deuxième enfant, Robert, les personnages Samantha et Darrin étaient déjà mariés depuis un certain temps. Contrairement à la saison initiale, les censeurs de la chaîne ont autorisé les scénaristes à intégrer cette nouvelle grossesse dans le scénario. Ainsi, la naissance de Robert s’est naturellement transformée en celle de Tabitha, le premier bébé des Stephens, apportant un nouvel élan à la série.
Plus tard, durant la sixième saison, Elizabeth Montgomery a de nouveau été enceinte, cette fois du troisième enfant, Rebecca. Fidèle à la démarche adoptée précédemment, l’équipe de Bewitched a incorporé cette grossesse dans la sitcom. Dans la fiction, Samantha et Darrin donnent alors naissance à leur second enfant, un garçon nommé Adam, qui deviendra par la suite un sorcier.
Cette intégration réaliste des événements personnels d’Elizabeth Montgomery dans le récit de Bewitched témoigne d’une adaptation narrative innovante pour l’époque, mêlant habilement vie privée et fiction. Ce choix a enrichi la série tout en conservant une fidélité et une authenticité qui ont séduit les spectateurs.
Lorsque l’on évoque le personnage de Tabitha dans la série Bewitched, c’est souvent l’actrice Erin Murphy qui vient immédiatement à l’esprit. Cependant, le rôle de la fille de Samantha et Darrin a été interprété par sept enfants différentes au fil des saisons, offrant une richesse méconnue à cette petite sorcière.
Le premier à incarner Tabitha fut Cynthia Black, âgée de seulement deux semaines et demie, dans l’épisode « And Then There Were Three » qui montre la naissance de la petite sorcière. Ensuite, un duo de jumelles, Heidi et Laura Gentry, interprétaient la fillette dans l’épisode « My Baby the Tycoon », se relayant pour donner vie au personnage.
Très vite, ces jumelles furent remplacées par un autre duo, Tamar et Julie Young, qui jouèrent Tabitha pendant toute la deuxième saison. C’est durant la troisième saison, marquée par la croissance du personnage, que deux nouvelles jumelles, Erin et Diane Murphy, endossèrent ce rôle.
Face aux différences visibles entre les deux actrices, Erin Murphy, dont le physique ressemblait davantage à Elizabeth Montgomery (Samantha), reprit le personnage à temps plein. Sa sœur Diane, bien que moins présente, fut également sollicitée pour divers rôles d’invitée, notamment dans l’épisode « A Bunny for Tabitha » où elle incarnait une fille frappée au ventre, et dans « Samantha and the Troll », en tant que version humaine de la poupée Raggedy Ann.

Le remplacement de Dick York par Dick Sargent dans le rôle de Darrin, mari de Samantha, à partir de la saison 6 de Bewitched, a profondément déconcerté les fans de la série. Cette transition n’a pas seulement perturbé les téléspectateurs, elle a également créé des tensions notables sur le tournage, notamment avec Agnes Moorehead, qui incarnait Endora.
Selon le témoignage relaté dans l’ouvrage Twitch Upon a Star de J. Pilato, une atmosphère parfois inconfortable régnait entre Moorehead et Sargent. David White, l’interprète de Larry Tate, le patron de Darrin, se rappelle qu’à la première lecture du scénario avec Sargent, Agnes Moorehead quitta brusquement sa place en déclarant : « Je n’aime pas le changement. »
Plus tard, lors d’un tournage en extérieur à Salem, dans le Massachusetts, White aperçut Sargent en larmes, blessé par une remarque de Moorehead. Malgré ces débuts difficiles, les deux comédiens finirent par surmonter leurs différends. Dans une interview en 1992, Sargent évoqua avec admiration le professionnalisme et le talent d’Agnes Moorehead, soulignant qu’ils étaient finalement devenus amis.
Selon le biographe Charles Tranberg, cette amitié s’est même concrétisée par les invitations régulières de Moorehead aux fêtes annuelles combinant Noël et anniversaire, auxquelles Sargent fut convié.
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Le sitcom Bewitched est surtout célèbre pour ses touches humoristiques sur les dynamiques de genre, mais il a aussi abordé des sujets sociétaux majeurs. En 1970, au cœur de l’ère des droits civiques, un épisode intitulé « Sisters at Heart » a traité ouvertement du racisme, grâce à l’initiative d’une enseignante passionnée, Marcella Saunders.
En 1969, Marcella Saunders, professeure d’anglais à Thomas Jefferson High School à Los Angeles, souhaitait éveiller l’intérêt de ses élèves pour l’écriture via un lien avec la télévision. Elle contacta plusieurs séries populaires, dont Bewitched. Elizabeth Montgomery et William Asher, figures phares du show, répondirent favorablement en invitant ses élèves sur le plateau. Suite à cette visite mémorable, les élèves concoctèrent un scénario centré sur une amitié interraciale entre Tabitha et une camarade noire.
Touchée par cette proposition, la scénariste principale Barbara Avedon transforma cette idée en un épisode spécial de Noël, diffusé en 1970. Dans « Sisters at Heart », Tabitha présente Lisa, une jeune fille noire qu’elle considère comme sa « sœur ». Lorsqu’un important client de Darrin les voit jouer ensemble, il suppose à tort que Darrin est marié à une femme noire et cesse de travailler avec lui, motivé par ses préjugés.
Cette réaction engendre un affrontement avec Larry, le patron de Darrin, qui pointe du doigt ce comportement discriminatoire. Finalement, le client réalise son erreur, reconnaît son racisme et présente ses excuses. Cet épisode reste un témoignage fort d’une série qui, tout en divertissant, a osé aborder des questions profondes et toujours actuelles.
Si vous êtes amateur de sitcoms classiques, la maison de Bewitched vous semblera probablement familière. En effet, selon diverses sources spécialisées, plusieurs éléments du décor ont été réutilisés dans différentes séries télévisées et films iconiques.
La façade extérieure de la maison des Stephens n’est pas une vraie demeure, mais un décor baptisé « 1164 Facade », situé sur le Columbia Ranch, un lieu de tournage légendaire où de nombreuses sitcoms de l’époque ont été filmées. Ce décor a notamment servi à représenter la maison du Dr Alfred Bellows dans I Dream of Jeannie, une autre série autour d’une épouse magique et d’un mari mortel. Dans les années 2000, ce même décor a été transformé pour la série The Geena Davis Show et a également figuré dans plusieurs publicités.
L’intérieur de la maison Bewitched a lui aussi été partagé avec d’autres productions. Le salon des Stephens a servi pour la série Gidget, tandis que le salon des voisins Kravitz a été utilisé dans I Dream of Jeannie et The Donna Reed Show. Par ailleurs, certains décors de Bewitched ont été recyclés pour les films Hook, Line and Sinker (1969) et Brian’s Song (1971).
Les fans des films National Lampoon pourraient aussi être surpris d’apprendre qu’il existe un lien inattendu avec Bewitched. La maison des Stephens a été utilisée pour représenter le domicile d’enfance de Clark Griswold dans National Lampoon’s Christmas Vacation, une touche intéressante qui souligne l’influence durable de ce décor dans la culture télévisuelle et cinématographique.
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Bewitched est célèbre pour son générique animé, créé par Hanna-Barbera Productions. Chaque fan reconnaît immédiatement cette séquence emblématique où Samantha survole la ville sur son balai, transforme son chapeau en poêle à frire, se métamorphose en chat et finit par sauter dans les bras de Darrin. Pourtant, peu savent que les personnages de Bewitched ont également fait deux autres apparitions animées.
En 1965, Samantha et Darrin ont vécu une deuxième aventure dans l’univers des dessins animés. Elizabeth Montgomery et Dick York prêtaient alors leur voix lors d’un épisode spécial crossover avec Les Pierrafeu. Intitulé « Samantha », cet épisode montre les Stephenses s’installant à Bedrock où ils se lient d’amitié avec Fred, Wilma, Betty et Barney. Fidèle à l’esprit de nombreuses intrigues de Bewitched, cet épisode aborde les stéréotypes de genre : lorsque Fred et Barney partent en expédition « entre hommes », Samantha campe avec Betty et Wilma pour démontrer que les femmes peuvent aussi survivre en pleine nature.
Sept ans plus tard, les enfants des Stephens ont eu droit à leur propre spécial animé avec Tabitha and Adam and the Clown Family. Ce programme d’une heure, diffusé dans le cadre de la « Saturday Superstar Movie » sur ABC, relate les aventures de Tabitha et Adam lors de la visite d’une tante travaillant dans un cirque, selon l’Encyclopedia of Animated Cartoons de Jeff Langburn.

De nombreux fans de Bewitched ont été charmés par Tabitha, la fille espiègle de Samantha et Darrin. En 1977, soit cinq ans après la diffusion du dernier épisode de la série originale, la chaîne ABC a décidé d’offrir au public une suite centrée sur ce personnage très apprécié en créant Tabitha, un spin-off mettant en scène une version adulte de la jeune sorcière.
Selon les sources, la série suivait les aventures de Tabitha et de son frère Adam, qui travaillaient pour la station de télévision KXLA à Los Angeles. Fidèle à l’esprit de Bewitched, Tabitha utilisait occasionnellement son célèbre pouvoir de frémissement de nez pour se sortir des situations délicates. Adam, alors un sorcier dans l’univers original, avait été réécrit en simple mortel, assurant ainsi le rôle de sceptique rationnel, un peu à l’image de Darrin dans la série mère.
Parmi les personnages récurrents, on retrouvait Tante Minerva, qui encourageait Tabitha à utiliser davantage sa magie, ainsi que Paul Thurston, un animateur de télévision et intérêt amoureux intermittent de Tabitha.
Erin Murphy, interprète originale de Tabitha, avait seulement 12 ans au moment du lancement de ce spin-off, ce qui a conduit la production à engager une nouvelle actrice. C’est Lisa Hartman, âgée de 21 ans et qui deviendra plus tard chanteuse, qui a hérité du rôle principal. David Ankrum incarnait son frère Adam, tandis que Karen Morrow et Robert Urich prenaient les rôles de Minerva et Paul Thurston.

Des décennies après sa diffusion télévisée, Bewitched a inspiré un film sorti en 2005, réalisé par la célèbre réalisatrice de comédies romantiques Nora Ephron. Cette adaptation cinématographique adopte une approche métatextuelle en racontant l’histoire d’une véritable sorcière moderne qui auditionne pour le rôle de Samantha dans un remake de Bewitched, utilisant ses pouvoirs pour faire tomber amoureux son partenaire de jeu.
Nicole Kidman incarne Isabel Bigelow, l’actrice qui joue Samantha, tandis que Will Ferrell interprète Jack Wyatt, l’acteur incarnant Darrin. Le casting principal comprend également Shirley MacLaine, Sir Michael Caine, Jason Schwartzman et Kristen Chenoweth, apportant une richesse de talents au film.
Cependant, le long-métrage n’a pas conquis tous les spectateurs. Il affiche une note d’approbation de seulement 24 % sur Rotten Tomatoes, et Le New York Times l’a qualifié de « désastre total ». Malgré cela, les performances de Kidman et Ferrell ont été saluées par la critique. Margaret Pomeranz, critique australienne renommée, a souligné la capacité de Kidman à capturer la naïveté douce d’Isabel, et a trouvé Ferrell « vraiment impressionnant dans un rôle particulièrement exigeant ». Roger Ebert a également décrit le duo comme « drôle et sympathique », contribuant ainsi à rendre hommage à cette réinterprétation audacieuse du classique.
Versions japonaises et russes de Bewitched
Il est fascinant de constater à quel point l’influence de Bewitched s’est étendue à travers le monde. La sitcom a connu un succès critique et populaire tel qu’elle a donné naissance à des adaptations dans des pays aussi éloignés que le Japon et la Russie.
Selon les informations figurant sur IMDb, une version japonaise de Bewitched a été diffusée en 2004, soit un demi-siècle après le succès de la série originale. Cette adaptation, intitulée Okusama wa majo (ma femme est une sorcière), est également connue sous le nom de Bewitched in Tokyo. Le rôle équivalent à celui de Samantha y était incarné par Ryoko Yonekura, tandis que le personnage de Darrin, rebaptisé Joji, était joué par Taizo Harada.
De son côté, la version russe, appelée Моя любимая ведьма (« Ma sorcière préférée »), a été proposée au public en 2009. D’après les archives de la chaîne russe TV3, cette réinterprétation transpose Samantha dans la peau de Nadya Stoletova, une descendante directe de Baba Yaga, la célèbre sorcière terrifiante issue du folklore russe. Anna Zdor a prêté ses traits à Nadya, tandis que son mari Ivan était incarné par Ivan Grishanov.