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Un procès concernant un trafic de cocaïne d’une ampleur peu commune s’ouvre à Créteil, impliquant vingt prévenus, dont onze policiers adjoints. Les faits se concentrent sur des agents de la police aux frontières soupçonnés d’avoir facilité le transport de drogue dissimulée dans des toilettes de l’aéroport de Cayenne. L’audience se déploiera sur deux semaines, où divers suspects, y compris des « mules » et plusieurs intermédiaires, devront répondre des accusations qui les concernent.
Les accusations incluent des individus chargés de récupérer la drogue à l’aéroport d’Orly et un collecteur de fonds basé à Aubervilliers, tous présumés impliqués dans un réseau organisé depuis la Guyane. Quatorze des accusés, dont deux femmes, se trouvent actuellement en détention provisoire.
Méthodes de transport et rôle des policiers
Les activités criminelles se sont déroulées entre mars 2022 et juin 2023, suite à l’ouverture par le parquet de Créteil de deux informations judiciaires. Selon les documents judiciaires, le trafic était centré sur l’aéroport Félix-Eboué de Cayenne, où des « mules » récupéraient de la cocaïne dissimulée dans des cubis de rhum, transformée sous forme liquide. Ces cubis contenant la drogue étaient subtilement remplacés par des versions normales achetées à la boutique hors taxes de l’aéroport.
Les produits stupéfiants étaient également camouflés dans des couches, des valises à double fond et même dans les sous-vêtements des transporteurs. Les gardes-frontières participaients directement en plaçant la drogue dans les toilettes, fournissant des instructions aux « mules » pour la récupération. De plus, des mesures étaient prises pour garantir que ces derniers échappent aux contrôles de sécurité avant l’embarquement, notamment par l’utilisation de pastilles de couleur apposées sur leurs passeports.
Efforts gouvernementaux contre le trafic
Cette organisation illégale avait pour but de contourner le dispositif « 100% contrôle des passagers », instauré à l’aéroport de Cayenne en octobre 2022 pour contrer le trafic de cocaïne. Un rapport sénatorial de 2020 indiquait que 15% à 20% de la cocaïne transitant vers la France passait par la Guyane. L’application stricte de ce contrôle a conduit à une réduction significative des saisies à l’aéroport, diminuant de 982 kg en 2022 à 571 kg en 2023, selon les statistiques fournies par la direction régionale des douanes.
Un des policiers, âgé de 25 ans et affecté à l’unité des contrôles transfrontaliers de l’aéroport, a reconnu avoir introduit 36 cubis de cocaïne liquide, réalisant ainsi un bénéfice personnel estimé à 76.000 euros grâce à ce trafic. Il sera jugé pour trafic de stupéfiants, participation à une association de malfaiteurs ainsi que pour des accusations de corruption passive et de détournement de données à caractère personnel.
Défense et implications des policiers
Les avocats des prévenus ont mentionné la complexité de la situation en raison du nombre important de personnes impliquées, dont la majorité sont des policiers. « Il faut juger des personnes, pas des uniformes », ont-ils déclaré, soulignant la nécessité d’une analyse individuelle des rôles de chacun dans ce scandale. Certains policiers sont également accusés de violation du secret professionnel. L’enquête a permis de remonter la filière criminelle après la saisie de cocaïne transportée par des « mules » lors de différents contrôles douaniers à l’aéroport d’Orly.
Une opération de grande envergure à Cayenne et Aubervilliers entre le 27 et le 29 juin 2023 a conduit à l’arrestation de 13 des suspects. Lors de cette action, dix kilos de cocaïne et près de 60.000 euros en espèces, dont 30.000 euros à Aubervilliers, ont été saisis selon les informations fournies par le parquet de Créteil.