Que se passe-t-il vraiment lorsque la CPI émet un mandat d’arrêt ?
En novembre 2024, la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé l’émission de plusieurs mandats d’arrêt visant des figures éminentes accusées de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité dans le cadre du conflit Israël-Hamas. Ce conflit qui fait rage à Gaza a dominé les actualités depuis l’attaque de Hamas contre Israël en octobre 2023. Parmi les personnes nommées figurent le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, l’ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant, ainsi que le leader du Hamas, Mohammad Deif. Ce dernier est mentionné malgré des rapports sur sa mort. Cette annonce marque un nouvel événement significatif dans le conflit israélo-palestinien, actuellement à un stade critique.
Les mandats ont suscité des réactions dans le monde entier et ont été salués par des groupes de défense des droits humains tels que Human Rights Watch et Amnesty International, ce dernier qualifiant l’autorisation contre Netanyahu de « percée historique pour la justice ». Toutefois, cela a également provoqué des controverses, notamment aux États-Unis, dont le gouvernement soutient Israël. Comme le rapporte The Guardian, le conseil de sécurité nationale des États-Unis a déclaré : « Les États-Unis ont clairement indiqué que la CPI n’a pas compétence sur ce sujet. En coordination avec nos partenaires, y compris Israël, nous discutons des prochaines étapes. » Il est vrai que, bien qu’un mandat d’arrêt de la CPI puisse faire les gros titres, son impact diffère directement d’un mandat délivré au niveau national.
La CPI a été créée après le 17 juillet 1998, lorsque 120 États du monde ont convenu d’adopter le Statut de Rome. En le faisant, ces États ont accepté la juridiction d’une cour pénale internationale permanente pour la poursuite des auteurs des crimes les plus graves commis sur leurs territoires ou par leurs ressortissants après l’entrée en vigueur de ce statut le 1er juillet 2002. La CPI a pour mission d’aider à traduire en justice ceux qui commettent des offenses graves affectant la communauté internationale, notamment en ce qui concerne les crimes de guerre.
Cependant, bien que la Cour ait le mandat d’enquêter sur les crimes et d’émettre des mandats d’arrêt pour ceux qu’elle considère comme responsables, la CPI ne peut pas procéder elle-même à l’arrestation de ces personnes. Ce sont les États qui ont adhéré au Statut de Rome qui sont tenus d’exécuter les décisions de la Cour sur leur territoire. Par exemple, le Royaume-Uni serait tenu, par la CPI et la communauté internationale, d’arrêter Benjamin Netanyahu s’il devait entrer dans le pays. La CPI ne jugera une personne que si le pays qui la détient est incapable ou refuse de le faire.
Avec le mandat d’arrêt émis, Netanyahu serait peu enclin à tenter d’entrer dans un tel pays et il reste à l’abri des arrestations en Israël. Une autre complication pour la CPI réside dans le fait que plusieurs nations influentes, y compris les États-Unis, ne sont pas membres de la Cour et ne sont pas obligées de respecter ses décisions.
Bien que la Cour pénale internationale n’ait pas le pouvoir d’arrêter elle-même les criminels accusés, ses mandats exercent néanmoins une grande influence sur la scène internationale. Dans une déclaration publiée lors de l’annonce des mandats d’arrêt de novembre 2024, la CPI a affirmé qu’il existait « des motifs raisonnables » de croire que les leaders israéliens nommés dans les mandats avaient « intentionnellement et sciemment privé la population civile de Gaza d’objets indispensables à sa survie. »
Malgré leur affrontement public avec les États-Unis, les conclusions de la CPI remettent en question les affirmations d’Israël selon lesquelles il aurait fait des efforts pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire aux citoyens palestiniens de Gaza. Selon les Nations Unies, environ 2 millions de personnes dans la région ont été déplacées. La CPI allègue qu’Israël a utilisé la famine comme une arme de guerre et qu’il a délibérément aggravé la crise humanitaire à Gaza. Ces conclusions pourraient avoir des répercussions pour les alliés d’Israël, dont plusieurs sont apparemment légalement contraints de cesser de fournir des armes aux pays qui commettent des crimes de guerre.