Les chimpanzés consomment de l’alcool au quotidien, une découverte fascinante

par Olivier
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Les chimpanzés consomment de l'alcool au quotidien, une découverte fascinante
Ouganda, Côte d’Ivoire

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L’essentiel

  • Une étude publiée dans la revue Science Advances établit que des chimpanzés sont quotidiennement exposés à l’éthanol via des fruits mûrs.
  • La consommation journalière des chimpanzés étudiés en Ouganda et en Côte d’Ivoire est estimée à environ 14 g d’éthanol, soit l’équivalent d’une pinte de bière pour un humain.
  • Ces résultats soutiennent l’hypothèse selon laquelle l’intérêt pour l’alcool et la capacité à le métaboliser pourraient provenir de nos ancêtres primates.

En se nourrissant de fruits très mûrs naturellement fermentés, les chimpanzés ingèrent à l’état sauvage des quantités d’éthanol comparables à plusieurs verres d’alcool par jour, selon une étude menée dans des forêts d’Afrique. Cette observation éclaire, selon les auteurs, certaines explications possibles du penchant humain pour la boisson.

L’équivalent d’une pinte par jour

Les chercheurs ont prélevé des fruits généralement consommés par ces primates et mesuré leur teneur en éthanol, produit par la fermentation des sucres. À partir de ces concentrations et des volumes de fruits ingérés quotidiennement, ils estiment que l’exposition journalière des chimpanzés étudiés est d’environ 14 grammes d’éthanol.

« On peut dire que ça équivaut à une pinte », précise Aleksey Maro, auteur principal de l’étude publiée dans la revue Science Advances, en soulignant que cet équivalent vaut pour un humain de poids bien supérieur à celui d’un chimpanzé.

Les auteurs notent toutefois que ces doses, bien que physiologiquement signifiantes, sont très diluées et ingérées au sein d’aliments, si bien que la question de savoir si les animaux sont véritablement intoxiqués reste ouverte.

Les travaux, conduits en Ouganda et en Côte d’Ivoire, montrent « pour la première fois que nos plus proches parents vivants consomment quotidiennement des doses d’alcool physiologiquement significatives », ajoute M. Maro. Ces résultats renforcent l’hypothèse du « singe ivre » formulée il y a plus de dix ans par le biologiste Robert Dudley, co-auteur de l’étude.

« La théorie de la gueule de bois évolutionniste »

Selon ce postulat, l’appétence humaine pour l’alcool et la capacité à le métaboliser seraient héritées d’ancêtres primates régulièrement exposés à l’éthanol via un régime riche en fruits. « Le nom est mal choisi, on devrait plutôt l’appeler la théorie de la gueule de bois évolutionniste », plaisante M. Maro.

Si la théorie avait d’abord suscité du scepticisme, elle a gagné en crédibilité ces dernières années, au gré de travaux montrant l’intérêt de certains singes pour des substances alcoolisées ou pour des fruits très mûrs contenant de l’éthanol.

Reste à savoir si c’est volontaire ou non

Pour Nathaniel Dominy, professeur d’anthropologie et de biologie de l’évolution, l’étude est « un véritable tour de force », mais elle ouvre aussi « de nombreuses nouvelles questions », notamment sur les conséquences biologiques et comportementales d’une exposition chronique à l’éthanol chez ces primates.

Les chercheurs n’ont pas pu déterminer si les chimpanzés recherchaient délibérément les fruits à haute teneur en éthanol ou s’ils les consommaient simplement parmi d’autres ressources alimentaires.

Loin d’être anecdotique, ce sujet mérite d’être approfondi pour mieux comprendre les origines de la consommation humaine d’alcool et évaluer ses risques et bénéfices potentiels. « Nous pouvons en apprendre davantage sur nous-mêmes à travers les chimpanzés », conclut Aleksey Maro.

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