Presque immédiatement après la mort, un corps commence à se décomposer. Une fois que le cœur cesse de battre et que les organes s’arrêtent, les muscles se raidissent lors de la rigidité cadavérique. Puis survient l’autolyse, un processus au cours duquel les cellules se dégradent sous l’action des enzymes propres au corps. L’étape suivante du processus de décomposition est le gonflement du corps, causé par les bactéries intestinales qui produisent un gaz malodorant. Cette phase, ainsi que les étapes qui conduisent finalement à la squelettisation, sont ralenties lorsque le corps est scellé dans un cercueil, surtout s’il a été embaumé.
En général, il faut environ 10 à 15 ans pour qu’un corps se décompose complètement à l’intérieur d’un cercueil. Selon Nicholas Passalacqua, professeur associé à la Forensic Osteology Research Station de l’Université Western Carolina, le processus de décomposition est d’environ cinq ans pour les corps non enterrés. Mais qu’en est-il d’un corps enfermé dans du béton ? Confiné dans un environnement aussi étanche à l’air, ce processus serait-il encore plus ralenti, voire totalement stoppé ? Bien que les données soient limitées à ce sujet, on sait que le béton peut en quelque sorte aider à préserver un corps mort.
Des cochons enveloppés dans du béton
Ce sujet n’étant pas fréquemment étudié, il existe néanmoins au moins deux expériences enregistrées sur les effets du béton sur la décomposition, utilisant des cochons comme substituts humains. La première est une étude de 2013 parue dans l’American Journal of Forensic Medicine and Pathology. Elle portait sur l’enterrement de quatre cadavres de porcelets (décédés de causes naturelles) dans du ciment afin d’observer les effets post-mortem macroscopiques et microscopiques. Pendant six mois, le bloc de béton contenant les carcasses a été ouvert périodiquement pour analyse.
Au bout d’un mois, les corps avaient commencé à pourrir, et les membres étaient partiellement squelettisés. À deux mois, la squelettisation avait progressé, accompagnée d’une putréfaction importante sur le dos et l’abdomen. Entre le troisième et le sixième mois, les corps étaient essentiellement momifiés avec des signes d’adipocère — une substance graisseuse post-mortem aussi appelée cire de tombe qui se forme dans des conditions d’absence d’oxygène. Les chercheurs en ont conclu que les modifications microscopiques peuvent être retardées sous béton.
Lors d’une autre expérience en 2020 publiée dans Biology, un cochon démembré a été enterré de manière similaire à un homicide où la victime aurait été découpée et ensevelie dans du béton. L’objectif était d’évaluer la capacité des technologies radiologiques à localiser des restes enfouis dans du ciment et d’analyser les effets de ce type d’enterrement sur la décomposition. Après un an, les chercheurs ont noté que la tête du cochon montrait une décomposition avancée, tandis que la jambe était encore à un stade précoce. Ces deux études démontrent donc que des corps encastrés dans le béton ne sont pas à l’abri de la décomposition.
Les corps humains enfermés dans le béton finissent par se décomposer
Les cochons enfermés dans du béton se décomposent, qu’en est-il des corps humains ? Bien qu’aucune étude comparative n’ait utilisé de cadavres humains pour analyser la décomposition dans du béton, plusieurs cas de corps humains découverts enfouis dans du béton ont été enregistrés, généralement dans des contextes criminels.
Un article publié dans Forensic Science International rapporte six cas de corps humains enfermés dans du béton ou scellés derrière des briques. Dans chaque cas, les défunts étaient des victimes d’homicides, leurs corps dissimulés par les meurtriers. Le deuxième cas présente les restes d’une femme de 31 ans retrouvée dans une cave où elle avait été enveloppée dans un linceul en aluminium puis enfermée dans un conduit en briques rempli de béton. L’article indique que “l’odeur de putréfaction était perceptible” dans la cave, preuve que la décomposition s’était déroulée avant l’exhumation pour autopsie. Le sixième cas décrit une femme de 53 ans enfermée dans une profonde cavité de son jardin remplie de béton, accompagnée d’une image détaillée de ses restes putréfiés.
L’étude conclut que, dans ces six cas, les corps enfermés dans le béton étaient enveloppés dans divers matériaux et que « les cadavres étaient conservés à un stade certain de putréfaction ». Elle précise également que « le simple fait d’enterrer un corps dans du béton et/ou de le sceller avec des briques n’empêche pas la diffusion d’odeurs. » Ces images témoignent de signes évidents de décomposition, même lorsqu’un corps est scellé dans une tombe de béton.