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Depuis 2016, une série de fouilles archéologiques préventives menées sous la place Renaudel à Bordeaux, dans le cadre de travaux de végétalisation, ont révélé l’existence d’une importante nécropole mérovingienne datant du VIe au VIIIe siècle. Ces investigations, supervisées par le service archéologique de Bordeaux Métropole et la direction régionale des affaires culturelles (Drac), ont permis de mettre au jour une centaine de tombes, dont environ cinquante sarcophages en pierre caractéristiques de cette période.
Ces sarcophages, au profil trapézoïdal distinctif, comportaient entre un et cinq squelettes, témoignant d’une pratique funéraire complexe où certains cercueils étaient réutilisés jusqu’au XIIIe ou XIVe siècle. Le reste des sépultures retrouvées, incluant des fosses en pleine terre et des cercueils en bois, appartient à des phases plus récentes, couvrant le bas Moyen Âge et l’époque moderne.
Un monastère bénédictin au cœur d’une nécropole étendue
Ces découvertes confirment qu’une communauté monastique s’était installée sur ce site dès le début du Moyen Âge, avec la construction d’un premier édifice religieux et d’une nécropole plus vaste que ce que les historiens imaginaient auparavant. Vers la fin du Xe siècle, un monastère bénédictin aurait pris place, puis l’abbaye Sainte-Croix s’est progressivement imposée comme un puissant domaine au XIIe siècle. Ce développement a conduit à l’intégration du quartier dans la troisième enceinte de la ville, alors qu’il se trouvait jusque-là en marge de Bordeaux.
Des vestiges médiévaux remarquablement préservés
À proximité immédiate de l’église Sainte-Croix, au niveau du secteur dit « triangle Tauziat », les archéologues ont également mis en lumière les fondations du cloître de l’abbaye, étonnamment bien conservées. Les murs de cette construction médiévale subsistent sur une hauteur notable, bien que situés juste sous la chaussée, ce qui constitue une trouvaille archéologique exceptionnelle à Bordeaux.
En outre, des sols carrelés datant du XIVe siècle ont été découverts, ornés de motifs floraux tels que des fleurs de lys, des lions ou des poules. Certains carreaux portent des traces de noircissement, laissant supposer qu’un incendie a ravagé une partie du site à cette époque.
Ce chantier de fouilles, exceptionnel par son ampleur — couvrant une surface de 2 700 m² en plein cœur de Bordeaux historique — doit se prolonger jusqu’à la fin 2026 et devrait encore révéler d’importants vestiges médiévaux.
Un site archéologique inscrit en profondeur
Les fouilles se limitent pour l’instant à une profondeur d’environ 1,10 mètre, conformément aux paramètres définis pour les travaux d’aménagement. Cette contrainte empêche pour l’instant d’explorer des couches plus anciennes. Toutefois, la récente découverte d’hypocaustes sous le Théâtre national Bordeaux Aquitaine indique qu’une villa romaine de standing occupait probablement ce secteur à l’époque antique. Ces vestiges antiques, enfouis plus profondément, restent à découvrir lors de futures interventions.
Le fait que les vestiges médiévaux soient proches de la surface s’explique par le nivellement important du terrain au XIXe siècle, qui a entraîné la disparition d’une partie des couches archéologiques, estimée à près d’un mètre de profondeur. Malgré cela, ce niveau archéologique reste exceptionnellement riche.
Dégradation moderne des vestiges et mesures de protection
Une partie des sarcophages visibles a été endommagée par l’installation, il y a une décennie ou deux, de réseaux souterrains (haute tension, fibre optique, gaz). Ces interventions, malencontreusement non signalées à l’époque, ont perturbé certains vestiges.
Pour prévenir de nouvelles dégradations, les archéologues procèdent à une protection et un recouvrement progressifs des structures non prélevées tout au long de l’avancée des fouilles. Cette méthode rend possible la poursuite simultanée des travaux de végétalisation dans la zone étudiée.