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Submersion marine, érosion du littoral, inondations, envasement des lagons… Dans les territoires ultramarins, les effets du dérèglement climatique sont déjà bien visibles. Alors que la métropole française s’efforce maladroitement de s’adapter à des vagues de chaleur de plus en plus intenses et fréquentes, les Outre-mer vivent une tout autre lutte.
Exposées particulièrement à la montée des eaux, les îles françaises voient depuis plusieurs années la disparition progressive de portions de leur territoire. Ces phénomènes menacent non seulement les paysages et la biodiversité, mais aussi la survie des populations locales. Une série d’images et de témoignages illustrent ces zones critiques où le littoral est grignoté de manière inexorable.
Territoires ultramarins en première ligne
Les Outre-mer représentent 22 % du territoire français métropolitain, mais couvrent 70 % de son littoral. En Polynésie française, sur 118 îles, 78 sont aujourd’hui menacées par l’élévation du niveau de la mer, avec un risque réel de disparition dans les décennies à venir. À Mayotte, La Réunion, et plus encore en Martinique et Guadeloupe, les récifs coralliens se dégradent fortement. Leur disparition affecte directement les écosystèmes et les populations : ces récifs jouent un rôle vital d’amortisseur face aux vagues de tempête et alimentent les plages en sable, protégeant ainsi le littoral de l’érosion.
En Guadeloupe, la régression du trait de côte menace aujourd’hui 160 sites archéologiques, dont une quinzaine sont déjà à moitié submergés. Parmi eux, la plage des Raisins-Clairs à Saint-François, où l’érosion a révélé au début des années 2010 un ancien cimetière d’esclaves, illustrant la vulnérabilité du patrimoine face aux impacts climatiques.
Stratégies d’adaptation face à la montée des eaux
Pour limiter l’impact de la montée marine, plusieurs solutions sont envisagées. L’élévation des quais et des bâtiments situés en première ligne se révèle indispensable, tout comme la conception de structures flottantes, plus souples que les constructions rigides traditionnelles. En bord de mer, la protection pourrait s’appuyer sur des blocs de béton, des brise-lames, digues et remblais artificiels, déjà en place sur certains sites.
Le Conseil économique, social et environnemental a récemment proposé des solutions basées sur la nature, notamment la restauration des mangroves et des herbiers marins capables de s’adapter à l’élévation du niveau de la mer. La préservation des écosystèmes sableux, des zones humides, et des récifs coralliens est également essentielle, car ces derniers dissipent efficacement l’énergie des vagues, réduisant ainsi l’érosion du littoral lors des tempêtes.
Néanmoins, certaines zones ultramarines devront inévitablement envisager la relocalisation des populations. C’est le cas des villages de Miquelon-Langlade et du Prêcheur en Martinique, menacés de disparaître progressivement sous les eaux.
Quel coût pour faire face à ces enjeux ?
Le financement des mesures d’adaptation repose en partie sur le Fonds vert, créé pour couvrir les frais liés à l’adaptation au dérèglement climatique. Lancé en 2023 avec une enveloppe de 2 milliards d’euros, puis portée à 2,1 milliards en 2024, ce fonds a pourtant vu son budget diminué en 2025, amputé de près d’un milliard d’euros. Cette réduction fragilise la capacité d’action sur le terrain.
Les conséquences économiques sont lourdes. Les risques côtiers de Pointe-à-Pitre et Jarry, en Guadeloupe, pourraient engendrer un coût annuel d’environ 100 millions d’euros d’ici 2050. Dans les scénarios les plus pessimistes, cette zone pourrait subir jusqu’à 180 jours d’inondation par an entre 2060 et 2080, ce qui soulève de redoutables défis de gestion et de continuité territoriale.
L’inaction face à la montée des eaux entraînera des coûts bien plus élevés que ceux liés aux mesures d’adaptation, rendant indispensable une mobilisation accrue des moyens pour protéger les territoires ultramarins, leur population et leur patrimoine naturel.
