Les origines et le destin étonnant de Winnie
Pour comprendre comment Winnie l’Ourson a failli se retrouver au cœur de la Première Guerre mondiale, il faut remonter aux origines surprenantes du personnage réel. Ce récit mêle aventure coloniale, animalerie de chemin de fer et la rudesse des conflits du début du XXe siècle.

A.A. Milne, créateur des histoires de Winnie l’Ourson, s’est largement inspiré des jouets de son fils Christopher. Au centre du bestiaire tendre de Milne se trouvait un ours en peluche nommé «Winnie», lui-même baptisé d’après un ours noir réel appelé Winnipeg, exposé plus tard au zoo de Londres.

Le début de l’aventure remonte à l’été 1914, dans l’Ontario. Un chasseur avait tué la mère de l’oursonnet et le vendait à la gare de White River lorsque le vétérinaire militaire canadien Harry Colebourn l’acheta pour 20 dollars. Il le baptisa «Winnipeg», du nom de sa ville natale, et l’ourson devint rapidement la mascotte du régiment, le 34th Fort Garry Horse (source).
La guerre, toutefois, change les plans. Malgré l’attachement de Colebourn, les autorités militaires estimèrent qu’un ours n’avait rien à faire dans les tranchées. Cette décision s’inscrit dans un contexte où de nombreux animaux furent toutefois mêlés au conflit — chiens, pigeons, chevaux et même un babouin sud-africain nommé Jackie, qui reçut une décoration pour faits d’armes après avoir servi en Europe (BBC).

Le sort de Winnipeg se joua en décembre 1914 : lorsque Colebourn partit pour la France, il confia l’ourson au zoo de Londres, promettant de revenir le chercher après la guerre. Cette promesse, cependant, ne se concrétisa pas et Winnie resta au parc zoologique.
- Découverte et achat du petit ours : White River, Ontario, août 1914.
- Acheteur : le vétérinaire militaire Harry Colebourn, qui le nomme «Winnipeg».
- Mascotte du 34th Fort Garry Horse avant d’être placé au zoo de Londres (9 décembre 1914).

Restée au zoo, Winnie devint l’une des attractions phares. Les soigneurs la qualifièrent de «complètement digne de confiance» et des photos d’enfants de l’époque lui donnant des cuillères de miel témoignent de sa popularité. Cette alimentation excessive au miel semble toutefois avoir contribué à l’usure prématurée de ses dents.

Winnie mourut en captivité en 1934. Si son destin ne fut pas celui d’un soldat, il influença durablement la culture populaire : son nom et son histoire inspirèrent A.A. Milne pour créer le personnage tendre et populaire connu sous le nom de Winnie l’Ourson. Pour les curieux, le crâne de l’ours est toujours visible dans un musée londonien (BBC).
Cette histoire illustre comment un petit animal canado-britannique, arraché à son milieu, a traversé la Grande Guerre sans y combattre mais en laissant une empreinte culturelle profonde — un pont inattendu entre la réalité historique et l’imaginaire de la littérature enfantine.
