Contexte historique de la colonie de lépreux

Au cœur de l’histoire de la Colonie de Lépreux à Hawaï se trouve une combinaison tragique de maladie, de politique et de géographie. La lèpre — aujourd’hui appelée maladie de Hansen, du nom du médecin norvégien qui identifia l’agent responsable en 1873 — existe depuis des millénaires, avec des traces remontant à environ 2000 av. J.-C. Jusqu’aux années 1940, la maladie restait souvent une condamnation lente et irréversible, et être malade pouvait être assimilé à un crime social.
La lèpre fit son apparition à Hawaï dès 1823, sans certitude sur son mode d’introduction : certains évoquent des travailleurs étrangers, d’autres un roi hawaïen de retour d’un voyage. Face à la propagation, les autorités instituèrent en 1865 l’exil forcé et à vie vers Kalaupapa, sur l’île de Molokai, afin d’isoler les malades. Selon l’ouvrage Kalaupapa: A Collective Memory d’Anwei Skinsnes Law, début juin 1866, 87 personnes furent envoyées à Kalawao, petit établissement de la péninsule de Kalaupapa; au fil du temps, quelque 8 000 personnes y vécèrent.
- Accès difficile : la péninsule n’était accessible que par un sentier escarpé et par la mer, rendant l’isolement quasi absolu.
- Effet sur les familles : la culture hawaïenne profondément familiale conduisit souvent des proches en bonne santé à accompagner ou rejoindre les exilés.
- Évolution culturelle : la colonie développa sa propre organisation sociale et des intervenants extérieurs vinrent améliorer les conditions sanitaires.
Damien, la dévotion et la vulnérabilité génétique

Parmi ceux qui vinrent aider figure le père Damien de Veuster, prêtre catholique dont l’engagement envers les habitants de Kalaupapa est resté célèbre ; il contracta lui-même la maladie et en mourut. La sœur Marianne Cope est une autre figure notable de cette solidarité. Leur action contribua à façonner un environnement de soins et de dignité au sein de la colonie.
Ce n’est qu’en 2004 qu’une équipe de chercheurs canadiens démontra le rôle d’une prédisposition génétique dans la vulnérabilité à la maladie. Certaines populations hawaïennes, ainsi que des personnes d’origine française, semblent avoir été plus sensibles à l’infection, ce qui explique en partie l’ampleur du fléau dans l’archipel.
Lorsque des avancées médicales permirent d’arrêter puis de guérir la maladie, les lois d’isolement furent levées. Pourtant, beaucoup d’anciens résidents choisirent de rester, attachés à la communauté qu’ils avaient construite. Un petit nombre d’entre eux y vit encore aujourd’hui, comme le relate un reportage récent de CNN.
