Comment les États-Unis ont perdu 6 armes nucléaires et Broken Arrow

par Angela
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Comment les États-Unis ont perdu 6 armes nucléaires et Broken Arrow
États-Unis, Canada, Espagne, Maroc

Pour résumer une période historique mondiale en la simplifiant à l’extrême, la Guerre froide fut particulièrement tendue. Des années 1940 jusqu’à l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, deux superpuissances — les États‑Unis et l’Union soviétique — se tenaient sur le qui‑vive, prêts à une éventuelle guerre d’ampleur. Si le conflit venait à s’emballer, il impliquerait presque certainement l’explosion de plusieurs arsenaux nucléaires, d’un pouvoir croissant et d’un impact potentiellement catastrophique. Cette époque a laissé le souvenir d’incidents connus sous le nom de « Broken Arrow », des accidents nucléaires qui n’ont pas provoqué de détonations thermonucléaires, mais qui ont conduit à la disparition de bombes et à des dégâts importants.

La première arme perdue au début de la Guerre froide

Bombardier B-36 en vol
Le premier engin perdu, embarqué sur un B-36, était une bombe Mark IV sans détonateur au plutonium.

En février 1950, un bombardier B‑36 de l’US Air Force emportait une arme nucléaire prêtée par la Atomic Energy Commission pour un entraînement. La bombe Mark IV ne disposait pas d’un déclencheur au plutonium, mais son cœur contenait de l’uranium et des explosifs conventionnels nécessaires pour atteindre la criticité et causer des dégâts importants.

Alors que l’appareil traversait l’air froid, la formation de glace augmenta le poids et mettait les moteurs sous forte contrainte — trois des six moteurs s’enflammèrent et furent éteints. L’avion perdit de l’altitude et, pour éviter que la bombe tombe entre de mauvaises mains, l’équipage la largua au-dessus du Pacifique. Des survivants ont rapporté avoir vu l’explosion lors de l’épreuve; l’avion, piloté presque par défaut par l’autopilote, vira et s’écrasa dans les montagnes de la Colombie-Britannique. Sur 17 membres d’équipage, 12 survécurent, et les enquêtes sur le site n’ont trouvé aucune preuve de la présence de l’arme.

Images associées à cet épisode rappellent l’époque et les enjeux, notamment la fragilité de l’armement face à l’erreur humaine et aux aléas climatiques.

Un jet transportant deux armes potentielles perdu sans trace

Jet portant deux armes potentielles perdu sans trace
Un B‑47 transportant deux éléments nucléaires est perdu sans trace après deux ravitaillements.

En mars 1956, un B‑47E Stratojet décolle de la base MacDill à Tampa pour un vol sans escale vers la base Ben Guerir au Maroc, avec deux ravitaillements prévus en vol. Le premier ravitaillement se déroule comme prévu et l’équipage poursuit sa route; le second ne se déroule pas aussi bien. Le dernier signal connu montre l’avion descendant à travers une épaisse couche nuageuse, au‑delà de 4 200 mètres d’altitude, au-dessus de la mer Méditerranée. La visibilité est médiocre et l’avion ne réapparaît jamais.

Le B‑47 transportait deux capsules de matériel nucléaire, contenues dans des caisses de transport et non encore assemblées en bombes. Malgré de vastes recherches et des rapports évoquant une chute près d’un village algérien, aucune trace de l’appareil ni de son équipage n’a été retrouvée. On suppose que les deux caisses sont tombées avec l’avion et les débris qui l’accompagnaient.

Une collision aérienne en 1958 déclenchant une autre affaire Broken Arrow

B‑47 en collision en vol
Collision en vol en 1958 impliquant des bombardiers B‑47 et un engin nucléaire.

En février 1958, un bombardier B‑47 se prépare à une mission d’entraînement destinée à simuler une attaque contre l’Union soviétique, en utilisant une ville de Virginie comme substitut pour Moscou. Alors que la mission évolue, l’appareil est impliqué dans la collision et doit effectuer un atterrissage d’urgence, nécessitant le largage rapide de sa charge lourde.

La bombe lourde, pesant environ 1,7 tonne, contenait 400 livres d’explosifs et une quantité de matériel nucléaire dont la localisation exacte restait incertaine. Bien que la bombe n’ait pas explosé, les autorités craignaient fortement les risques radiologiques. Malgré des recherches intensives, aucune pièce n’a été retrouvée dans les eaux au large de Tybee Island, près de Savannah, en Géorgie. Il subsiste aujourd’hui l’héritage d’un engin potentiellement nucléaire enfoui dans les sédiments marins.

Des parties d’une arme encore enfouies en Caroline du Nord

Des pièces d'une arme nucléaire encore enfouies en Caroline du Nord
Des fragments restant d’une arme nucléaire, enfouis dans le sol de Caroline du Nord.

En janvier 1961, un bombardier B‑52 au-dessus de Goldsboro, en Caroline du Nord, est en mission d’alerte. Cette mission, préparatoire à l’opération Chrome Dome, vise des vols de 24 heures et implique des ravitaillements en vol. Un défaut de structure provoque la libération de l’un des engins, et les bombes nucléaires entrent dans une phase d’armement non opérationnel, avec parachutes de secours déployés pour l’un des deux, lequel atterrit sain et sauf, tandis que l’autre s’écrase au sol sans déclencher d’explosion. Les enquêteurs ont mis en évidence la difficulté de récupérer toutes les pièces, et une partie du sol a été jugée irradiée, nécessitant un contrôle et une interdiction d’y creuser. Des documents officiels signalent l’absence de danger radiologique majeur, mais l’ombre du radioactif plane encore sur la région.

Une arme glissée d’un porte‑avions

Arme nucléaire tombée d’un porte-avions
En 1965, un A‑4E Skyhawk s’affale dans l’océan avec une arme thermonucléaire à bord.

Dans les dernières semaines de 1965, un A‑4E Skyhawk tombe à l’océan près du USS Ticonderoga, porte-avions stationné près du Japon, dans la mer des Philippines. À bord se trouvent le pilote et une bombe B43 d’un rendement un mégaton. L’appareil devait être simulé lors d’un entraînement sur le pont; le pilote manque les signaux et le Skyhawk bascule dans l’océan. Seuls des éléments du casque de Mitchell ont été retrouvés; le reste est resté au fond, et les autorités ont choisi de garder le silence pendant longtemps. Le cas n’a été officiellement révélé au Japon qu’en 1989, environ 200 milles au nord‑ouest des îles Ryūkyū.

Une affaire Broken Arrow demeure mystérieuse

Vue des opérateurs sur la tour du sous‑marin USS Scorpion
Selon les documents du ministère de la Défense, une disparition en mer s’est produite à l’Atlantique au printemps 1968; les détails restent classifiés.

Les archives du ministère de la Défense indiquent qu’un incident s’est produit « en mer, dans l’Atlantique », au printemps 1968, mais les détails restent classifiés. On peut raisonnablement conclure qu’un engin portant des armes nucléaires a été perdu quelque part dans l’Atlantique, au cœur de la Guerre froide. Beaucoup ont remarqué que le lieu et l’époque concordent avec la disparition du sous‑marinier nucléaire USS Scorpion, qui a sombré en mai 1968, avec presque toute son équipage et au moins une arme nucléaire à bord.

En octobre de cette même année, des recherches menées dans le cadre d’un vaste objectif ont permis de localiser des éléments du Scorpion à environ 3 000 mètres de fond dans l’Atlantique moyen, à quelque 400 miles au sud‑ouest des Açores. Le site a été revisité à plusieurs reprises, mais il reste incertain si des matériels nucléaires ont été récupérés lors des fouilles ultérieures. L’origine exacte de la disparition est encore débattue, mais la thèse d’un accident mécanique était la plus répandue, loin de toute attaque soviétique.

Aux États‑Unis: une alerte qui a failli tourner au pire

Mars Bluff, incident de 1958 ayant détruit une maison
Un bombardier B‑47 a largué sa charge au-dessus de Mars Bluff, en Caroline du Sud, détruisant une maison et laissant des traces radiologiques.

En 1958, même sans déclencheur au plutonium pur, les explosifs conventionnels d’une arme Broken Arrow pouvaient causer d’immenses dégâts. En mars 1958, un B‑47E Stratojet en vol au-dessus de Florence, en Caroline du Sud, perd accidentellement son arme nucléaire à 4 570 mètres d’altitude. Le bombardier était équipé d’un mécanisme défectueux et d’un pin de déclenchement d’urgence activé par erreur. Bien que l’arme n’était pas armée, sa chute a provoqué un impact à proximité d’une maison rurale. La désastreuse explosion n’a pas eu lieu, mais les dégâts ont été conséquents: la maison principale et des bâtiments environnants ont été rasés, et un cratère de plus de 6 mètres de profondeur est apparu dans le jardin.—le tout provoquant d’importantes discussions autour des mesures de sécurité et des indemnisations.

Une base au Groenland irradiée

Base de Thulé irradiée après un accident 1968
En 1968, un B‑52 s’écrase à Thulé, au Groenland, avec quatre armes nucléaires à bord; trois ont été retrouvées.

Thule Air Base, dans le Groenland, a été occupée par les États‑Unis dès 1951 et a joué un rôle clé dans les missions longues et le système de détection des missiles. En janvier 1968, un B‑52 sur une mission d’alerte a pris feu dans l’habitacle et, à l’approche de Thulé, l’équipage a dû évacuer. L’avion s’est écrasé sur la calotte glaciaire avec quatre armes nucléaires à bord. Les explosifs conventionnels ont été assurément dégagés et un champ de débris s’est formé; les armes nucléaires n’auraient pas été compromises et une évaluation de 2001 indiquait que l’exposition à la radiation était dans les normes. Des analyses ultérieures suggèrent toutefois que seulement trois armes ont été récupérées et qu’une partie de l’une d’elles pourrait être piégée dans la glace, rendant la sécurité et le nettoyage plus complexes.

Un pilote héroïque a évité une catastrophe en 1961

Un pilote héroïque a évité une catastrophe en 1961
En 1961, un B‑52F transportant deux armes nucléaires aurait pu connaître une fin bien plus tragique sans les actions d’un pilote.

Un incident Broken Arrow en 1961 aurait pu être beaucoup plus grave si un seul pilote n’avait pas agi avec détermination. Le B‑52F, portant deux armes composite core, est resté en vol malgré des pannes et une dépressurisation du cockpit, ces derniers éléments ayant provoqué des symptômes chez les membres de l’équipage. Le commandant, le major Raymond Clay, est resté à bord pour guider l’appareil loin des zones habitées et a abandonné l’appareil à 1 219 mètres d’altitude. L’avion s’est écrasé dans une zone rurale californienne, dispersant des débris et des pièces des bombes thermonucléaires sur 8 hectares environ. Les équipes de récupération ont pu confirmer que les bombes avaient été endommagées mais ne s’étaient pas déclenchées et que tout le matériel radioactif était contenu.

L’Espagne a été accidentellement bombardée en 1966

Palomares, Espagne, bombardement accidentel en 1966
En 1966, une collision entre un B‑52 et un avion-citerne survole Palomares, en Espagne, laissant tomber quatre armes thermonucléaires.

Personne n’est blessé sur le sol espagnol lorsque le B‑52 s’est embourbé dans une collision avec un avion-citerne, au-dessus du sud de l’Espagne. Le bombardier s’est désintégré au‑dessus du village de Palomares, libérant quatre armes thermonucléaires sur le sol. Fort heureusement, aucune victime terrestre n’est à déplorer et les autorités ont rapidement mobilisé les secours et les mesures de sécurité environnementale. Les équipes américaines ont récupéré les débris et des milliers de tonnes de sol contaminé, marquant l’un des plus importants nettoyages toxiques de l’histoire. Après des semaines de recherches, trois bombes ont été retrouvées; la quatrième, et une partie de ses composants, a été localisée et neutralisée plus tard, par un submersible.

Damascus, Arkansas a connu une alerte dangereuse en 1980

Alerte près de Damascus, Arkansas, en 1980
En 1980, une clé de maintenance a laissé échapper une clé qui a provoqué une explosion et une évacuation autour du Titan II, menaçant la population.

À Damascus, dans l’Arkansas, une élévation de tension et une clé lâchée ont provoqué un incident dramatique autour d’un missile Titan II dans son silo 374‑7. Une clé et une clé de serrage ont été abandonnées par inadvertance, provoquant une fuite de carburant et, peu après, une explosion qui a tué un membre du personnel et blessé gravement un autre. La ogive s’est envolée mais est restée largement intacte et les niveaux radioactifs restants ont été contenus après une épuration exhaustive. L’accident a conduit à une révision des protocoles et à des travaux de sécurisation du site.

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