
À travers l’histoire connue, certains objets se distinguent par leur aura intemporelle, comme l’épée légendaire Excalibur du roi Arthur ou la Lance du Destin qui aurait percé le flanc du Christ lors de la crucifixion. Parmi ces armes mythiques, la Kusanagi-no-Tsurugi occupe une place à part dans la culture japonaise. Cette épée est l’un des trois trésors sacrés impériaux, symboles du pouvoir et de la souveraineté du Japon.
Initialement nommée Ame-no-Murakumo-no-Tsurugi, ce qui se traduit approximativement par « l’Épée des nuages célestes rassemblés », elle a été utilisée pour terrasser un serpent à huit têtes, une créature mythique menaçante. Avec l’aide du dieu de la mer et des tempêtes Susanoo, ce monstre à huit têtes fut vaincu suite à l’enfoncement de l’Épée dans sa queue. L’arme resta là, jusqu’à ce que Susanoo la récupère et l’offre à la déesse du Soleil, Amaterasu Omikami, qui la transmit à son petit-fils Ninigi lors de sa descente sur Terre pour y régner. Ce dernier, brandissant la Kusanagi, fonda la première maison impériale japonaise, le clan Yamato, et engendra l’empereur Jimmu, considéré comme le premier empereur du Japon.

Au fil des siècles, la Kusanagi a été transmise de génération en génération et vénérée au sein des temples impériaux. Vers le IIe siècle de notre ère, Yamato Takeru, fils de l’empereur Keikō, fut l’un des derniers à manier cette arme mythique. Confronté à un incendie provoqué par un rival dans une prairie, il utilisa la Kusanagi pour trancher l’herbe enflammée, ce qui valut à l’épée son nom actuel, « épée coupe-herbe ». Malheureusement, lors d’une expédition pour affronter un dieu du mont Ibuki, Takeru abandonna la Kusanagi, perdit la bataille et sa vie, ainsi que la possession de l’arme légendaire.
Plus tard, il est rapporté que la Kusanagi fut impliquée dans la mort de l’empereur Temmu en 686. Au XIIe siècle, des récits évoquent la perte de l’épée lors d’une bataille navale, où un soldat l’aurait jetée en mer pour s’en débarrasser. Depuis, une réplique de la Kusanagi est conservée dans le sanctuaire d’Atsuta, attendant peut-être le retour de l’originale.

Cette histoire soulève une question essentielle : la Kusanagi-no-Tsurugi a-t-elle réellement existé ? Selon la majorité des historiens, l’épée fut sans doute bel et bien réelle à un moment donné. Néanmoins, son existence actuelle demeure entourée d’incertitudes. La réplique conservée au sanctuaire d’Atsuta fait partie des joyaux impériaux remis à l’empereur Akihito lors de son accession au trône en 1990. Fidèle à la tradition millénaire, cette épée mythique n’a jamais été exposée publiquement, conservant ainsi son aura mystérieuse et sacrée.
