Les circonstances et les récits contradictoires
Pour relier cette partie au fil de l’article, il importe de replacer la fin de vie de Jack London dans le contexte de sa personnalité complexe et de ses problèmes de santé persistants.

L’auteur du Call of the Wild était à la fois extrêmement prolifique et contradictoire : socialiste et athée, parfois porteur d’idées racistes, aventurier et individualiste, il combattait aussi une forte dépendance à l’alcool. Vers la fin de sa vie, il souffrait d’une maladie rénale contractée lors d’un voyage dans le Pacifique Sud, accompagnée de douleurs intenses aggravées par l’alcool.
Il a été retrouvé mort sur le perron de sa propriété du comté de Sonoma, en Californie, le 22 novembre 1916, à l’âge de 40 ans. Les circonstances de sa mort ont rapidement donné lieu à deux récits contradictoires qui divisent encore chercheurs et lecteurs :

- Cause officielle sur le certificat de décès : certains documents contemporains attribuent la mort à des complications d’une infection rénale, dite « urémie aiguë », résultat d’une défaillance rénale progressive.
- Témoignages médicaux contradictoires : des médecins appelés sur les lieux n’ont pas donné d’avis uniformes : l’un aurait noté un empoisonnement à la morphine, tandis que le médecin personnel a ensuite inscrit une défaillance rénale aiguë.
- Indices matériels évoquant une overdose volontaire : des observateurs ont rapporté la présence de deux flacons vides — morphine sulfate et atropine sulfate — ainsi qu’un papier comportant un calcul d’une dose létale, éléments qui ont nourri l’hypothèse du suicide.
- Antécédents et interprétations divergentes : des épisodes antérieurs de pensées suicidaires chez London sont cités par certains biographes comme argument en faveur d’une mort volontaire, tandis que d’autres avancent des explications plus nuancées.
- Le témoignage familial : sa fille Joan fit valoir que son père avait passé des plans avec elle la veille de sa mort, ce qui pourrait indiquer qu’il n’avait pas l’intention de se donner la mort. Elle reconnaissait toutefois l’incertitude, déclarant en substance : « Qui pourrait dire s’il s’agissait d’une intention suicidaire ou d’une simple overdose au milieu de l’agonie ? »
Ce mélange d’indices médicaux, d’éléments matériels et de témoignages personnels laisse la question ouverte : la mort de Jack London relève-t-elle d’une maladie inexorable, d’une overdose accidentelle ou d’un acte volontaire ?
Cette controverse continue d’alimenter les travaux historiques et biographiques autour de Jack London, et éclaire autant la fragilité de sa santé que les zones d’ombre persistantes dans la documentation.
