La Tragédie du Black Hole de Calcutta : Prison du XVIIIe Siècle

par Olivier
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La Tragédie du Black Hole de Calcutta : Prison du XVIIIe Siècle
Inde

Black Hole de Calcutta, 2017

Lorsque l’on évoque l’Inde, on imagine souvent une nation unifiée partageant une culture homogène. Pourtant, bien que l’hindouisme, le bouddhisme et l’islam soient des liens communs, la population s’identifie davantage à son État ou sa région, parmi les 29 constituant le pays, comme le Rajasthan, Goa, Delhi ou le Kerala. Cette diversité s’explique notamment par l’histoire récente de l’Inde moderne, née en 1947, après plus d’un siècle de domination britannique sous le Raj. Cette période impériale s’est conclue par la partition de l’Inde et la création du Pakistan, majoritairement musulman.

Avant 1858, le pouvoir britannique en Inde était principalement incarné par la Compagnie anglaise des Indes orientales, née d’un accord commercial signé en 1613 avec l’Empire moghol. La tension entre les autorités locales et cette compagnie a culminé lors de la bataille de Plassey en 1757. Ce conflit vit le Nawab de Bengale, Siraj-ud-Daula, attaquer avec ses forces un avant-poste britannique à Fort William, à Calcutta (aujourd’hui Kolkata). Doté d’une armée impressionnante de 50 000 soldats et 500 éléphants de guerre, il assiégea les 170 soldats britanniques pour menacer la domination anglaise. Ce choc marqua le début d’une réaction britannique déterminée qui allait conduire à la chute des Moghols et à une ère d’insurrections durant un siècle.

L’incident du Black Hole de Calcutta : cet épisode tragique survenu le 20 juin 1756 reste l’élément déclencheur du conflit majeur. Le jeune Nawab, irrité par les fortifications britanniques de Fort William et la rivalité avec la France dans la région, ordonna l’arrestation des soldats britanniques survivants. Ces derniers furent enfermés dans une petite cellule, insalubre et mal ventilée, baptisée plus tard le « Black Hole de Calcutta ».

La Compagnie des Indes orientales

La période de déclin de l’Empire moghol s’était accentuée après la mort d’Aurangzeb en 1707, donnant lieu à des luttes internes pour le trône et affaiblissant le pouvoir central. Cela permit à la Compagnie des Indes d’étendre son influence au travers des nawabs, gouverneurs locaux qui partageaient le contrôle des territoires. Fort William, édifié fin XVIIe siècle pour sécuriser le port de Calcutta, devint un symbole du pouvoir britannique face aux forces locales et aux rivaux français.

La réaction de Siraj-ud-Daula face aux fortifications britanniques prit la forme d’une offensive massive en juin 1756, faisant fuir la plupart des résidents anglais. John Zephaniah Holwell, chargé de la collecte des taxes et de l’application des lois, fut laissé à la tête des troupes assiégées. Sans expérience militaire, il capitula dès le 20 juin.

Peinture d’un éléphant moghol

Les prisonniers britanniques furent entassés dans une cellule exiguë et étouffante durant les chaleurs estivales, causant la mort de nombreux d’entre eux. Le récit initial évoquait 146 captifs enfermés dans un espace d’environ 5,5 mètres de côté, avec seulement 23 survivants au matin. Aujourd’hui, ce chiffre est considéré comme une exagération ; le nombre de détenus réels aurait été aux alentours de 65. Certains historiens avancent même que le témoignage d’Holwell pourrait avoir été amplifié, voire partiellement inventé.

Cette tragédie fut néanmoins exploitée par les marchands britanniques pour justifier la colonisation accrue de l’Inde, arguant que seule une mainmise directe du Royaume-Uni garantirait la sécurité des ressortissants anglais. Ainsi, près d’un an plus tard, la bataille de Plassey permit à Robert Clive de reprendre Calcutta avec une armée de 2 500 hommes. Cet événement scella un nouveau chapitre impérial qui allait durer près de deux siècles.

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