Retour des habitants et réalités historiques

L’accident nucléaire de 1986 reste l’une des catastrophes les plus dramatiques du XXe siècle. La zone autour du réacteur — dite « zone d’exclusion » — a été vidée de ses habitants et demeurer sur place est officiellement interdit. Malgré cela, un petit nombre de personnes ont choisi de revenir ou de ne jamais partir.
Parmi eux, environ 200 individus — pour la plupart des personnes âgées — sont souvent désignés par le terme russe « samosely », littéralement « ceux qui se sont réinstallés ». Leur attachement aux terres ancestrales, la difficulté à reconstruire une vie ailleurs et un profond lien culturel expliquent en grande partie leur décision de rester.
- Profil : majoritairement des personnes âgées, souvent très liées à leur village d’origine.
- Mode de subsistance : cueillette, potagers locaux et, pour certains, aides externes.
- Statut légal : présence non autorisée dans la zone d’exclusion, mais peu d’efforts systématiques ont été menés pour contraindre leur départ.

Ces « résidents historiques » ne sont pas les seuls à fréquenter les abords de la zone. Ces dernières années, de nouveaux arrivants se sont installés dans des villages situés tant du côté ukrainien que biélorusse de l’exclusion. Des politiques locales et des conditions économiques ont attiré des personnes recherchant un logement bon marché ou des aides, tandis que des déplacés par les conflits ont parfois trouvé refuge à proximité.
Un cas révélateur est celui d’une migrante pauvre qui, après avoir fui des bombardements, a trouvé un toit en s’occupant d’un vieil habitant atteint de démence. À son décès, la maison lui est revenue et elle y a installé sa famille, illustrant ainsi les dynamiques informelles de transmission et de regroupement humain autour de Tchernobyl.

Si la radioactivité ambiante a considérablement diminué depuis l’après-accident, la zone n’en reste pas moins risquée pour une vie à long terme. La menace principale aujourd’hui est liée à la contamination du sol, qui peut contaminer les cultures et la chaîne alimentaire locale.
- Contamination du sol : les radionucléides persistants peuvent s’accumuler dans les végétaux cultivés sur place.
- Produits animaux : le lait et la viande d’animaux se nourrissant d’herbes contaminées présentent parfois des niveaux de radioactivité préoccupants.
- Curiosités scientifiques : certaines formes de vie, comme des champignons capables d’absorber des radionucléides, témoignent de la complexité des interactions entre la radioactivité et les écosystèmes.
Pour beaucoup d’habitants ou de nouveaux venus, le choix de vivre près de Chernobyl est dicté par des priorités immédiates : la sécurité face aux violences, un toit pour la famille, ou la préservation d’un lien territorial. Comme le confie l’une d’entre elles : « Je me fiche de la radioactivité. Tout ce qui compte, c’est que mes enfants ne soient pas sous les bombes. Ici, c’est calme. Nous dormons bien et nous n’avons pas à nous cacher. »
Ces trajectoires — entre mémoire, survie et attachement au sol — éclairent une page singulière de l’histoire de Chernobyl, où les récits individuels se mêlent aux enjeux scientifiques et culturels d’une région durablement marquée par la catastrophe.
