Le réchauffement climatique, particulièrement le recul de la banquise en Antarctique, provoque un déclin « plus rapide que prévu » de la population des manchots empereurs. Selon une étude britannique majeure, plusieurs colonies ont perdu plus de 20 % de leurs membres en quinze ans.
Ce déclin accéléré a été mesuré par satellite dans seize colonies réparties sur la péninsule antarctique, la mer de Weddell et la mer de Bellingshausen, représentant ainsi un tiers de la population de cette plus grande espèce de manchots au monde. Les résultats ont été publiés dans la revue Nature Communications : Earth & Environment.
Les poussins victimes de la fonte de la banquise
« Nous observons une illustration très préoccupante du changement climatique avec un déclin démographique plus rapide que prévu, mais il n’est pas encore trop tard », explique Peter Fretwell, chercheur du British Antarctic Survey ayant dirigé l’étude. Ce déclin s’avère « probablement environ 50 % plus grave » que les estimations les plus pessimistes des modèles informatiques.
La principale cause du recul des populations est la fonte de la glace sur laquelle les manchots se reproduisent. Ces dernières années, certaines colonies ont perdu tous leurs poussins, noyés ou morts de froid quand la glace a cédé sous leurs pattes fragiles avant qu’ils ne soient prêts à affronter l’océan glacial.
Les données suggèrent que la baisse des effectifs a commencé dès 2009, avant même que la fonte annuelle de la banquise ne devienne plus marquée. Peter Fretwell précise que le changement climatique reste le moteur principal du déclin, aggravé par des précipitations accrues et la montée des prédateurs tels que les orques et les phoques.
Des mesures urgentes nécessaires pour préserver l’espèce
« Il n’y a ni pêche ni destruction directe de leur habitat, ni pollution responsable du déclin », souligne le chercheur. « C’est essentiellement la température et l’état de la glace sur laquelle ils vivent et se reproduisent, c’est le changement climatique qui en est la cause. »
Les manchots empereurs, Aptenodytes forsteri, comptent environ 250 000 couples reproducteurs, tous en Antarctique. Contrairement aux pingouins de l’hémisphère nord, ces oiseaux sont incapables de voler et appartiennent à une famille différente.
Peter Fretwell estime qu’il existe une possibilité que les manchots se déplacent vers le pôle Sud à l’avenir, mais il est difficile d’évaluer combien de temps ils pourront survivre dans ces nouvelles zones. Les modélisations antérieures prédisaient une quasi-extinction de l’espèce à la fin du siècle sans réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Face à ces nouvelles données alarmantes, il pourrait être nécessaire de réviser ces modèles et d’étendre les études à la population globale restante. « Nous perdrons probablement beaucoup de manchots empereurs, mais si nous diminuons nos émissions de gaz à effet de serre, il est possible de sauver l’espèce », conclut le scientifique.
