Les représentations des chevaliers médiévaux en armure ont envahi la culture populaire, des comédies absurdes comme Monty Python and the Holy Grail aux drames épiques à l’image de Game of Thrones. Souvent, ces guerriers sont dépeints soit comme des colosses maladroits figés derrière leur armure, soit comme des danseurs agiles maniant deux épées avec souplesse. Cette dichotomie a nourri beaucoup de confusion et de mythes autour du port et de l’utilité des armures médiévales.
La période dite « médiévale » couvre en général le XIe au XVe siècle en Europe, avant la Renaissance. À cette époque, l’armure n’était ni un simple costume, ni une simple protection : c’était un outil militaire hautement développé, évoluant grâce aux progrès en métallurgie et aux exigences du combat. Fabriquée à partir de cuir, bronze, fer, puis d’acier — un alliage complexe de fer et de carbone —, chaque armure variait selon son épaisseur, sa forme et son poids, tous adaptés selon le savoir-faire et les ressources du forgeron.
Cela signifie que l’impact sur le corps du guerrier dépendait en grande partie du type d’armure porté et de sa qualité. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ces équipements n’étaient pas imposés en permanence sur les chevaliers, mais réservés aux combats ou aux occasions spéciales. L’armure complète, apparue au XIVe siècle, avait été allégée et optimisée pour préserver la mobilité.
Les armures étant personnalisées pour chaque porteur, elles étaient taillées sur mesure afin d’épouser les formes du corps au mieux. Ainsi, loin d’être un carcan rigide et impraticable, elles offraient une certaine souplesse dans la vie quotidienne des chevaliers. Parmi les différentes formes, on trouve :
- La brigandine, composée de plaques métalliques fixées sur cuir,
- La cotte de mailles, constituée d’anneaux entrelacés,
- Le haubert, long vêtement souvent doté d’une coiffe intégrée,
- Le cuirasse, associant plaques protectrices sur le torse,
- La cotte d’écailles, avec ses plaques ovales disposées en rangées décalées,
- Et bien sûr, la fameuse armure complète en plaques d’acier.
Concentrons-nous sur la plus célèbre et impressionnante : l’armure complète. Contrairement à l’image d’un guerrier à moitié paralysé sous des kilos de métal, son poids oscillait entre 16 et 25 kilogrammes, soit un fardeau lourd, mais loin d’être insurmontable. Des chevaliers pouvaient aisément monter ou descendre de cheval sans aide, et certains s’amusaient même à faire des roulades ou à nager en armure.
Pensons à une comparaison moderne : un sac à dos chargé ne doit idéalement pas dépasser 20 % du poids corporel pour ne pas fatiguer excessivement. Si une personne pèse 90 kg, son sac ne devrait pas dépasser 18 kg. Hors, une armure complète répartit ce poids sur tout le corps, couvrant bras, jambes, torse, ce qui modifie profondément la posture, la manière de marcher et de respirer.
Porter une armure au quotidien aurait donc demandé au corps de s’adapter, renforçant naturellement la musculature tout en provoquant une fatigue plus intense qu’avec des vêtements légers. La transpiration abondante, la difficulté à accomplir des gestes fins et le risque d’épuisement auraient rendu cette expérience éprouvante, mais formatrice.