Sommaire
Par une claire nuit étoilée dans la baie de Mercury, en Nouvelle-Zélande, Victor Rault profite du calme après avoir mouillé son voilier. Ce Rennais de 35 ans embarque à bord de ce robuste bateau en acier de 12 mètres pour une expédition d’exception. Depuis près de quatre ans, il suit un tour du monde à la voile qui se démarque par son ambition : retracer les traces laissées par Charles Darwin deux siècles plus tôt, lors de son périple naturaliste célèbre, et ainsi observer l’évolution de la biodiversité à l’échelle planétaire.
À l’instar du père de la théorie de l’évolution, Victor Rault arpente les mêmes routes maritimes et terrestres que Darwin, en commençant son voyage à Plymouth, en Angleterre, le 12 septembre 2021. Il dépasse le Cap-Vert avant de rejoindre l’Amérique du Sud, dans les lieux emblématiques visités par Darwin, pour réexaminer un monde en pleine transformation. Ce voyage scientifique et historique s’apparente à une enquête minutieuse, où il repose ses yeux sur des paysages et des espèces que le naturaliste britannique avait décrits avec une précision remarquable.
Un comparatif naturaliste entre deux époques
La genèse de l’expédition Captain Darwin remonte à 2019, en Polynésie française, lorsqu’après avoir lu les écrits de Darwin, Victor Rault s’est senti inspiré par la proximité géographique des sites naturels observés par le scientifique anglais. Son projet est d’établir un parallèle entre la biodiversité des années 1830 et celle d’aujourd’hui, à travers la photographie, la vidéo et l’analyse scientifique.
Alors que Darwin disposait uniquement de ses observations visuelles et d’un carnet de notes, Victor exploite aujourd’hui des technologies modernes telles que drones et caméras sous-marines pour collecter des données quantitatives. Cette différence méthodologique lui permet de mettre en lumière les changements profonds intervenus dans la faune, la flore, et les paysages, bien qu’il reconnaisse que le rapprochement entre ces deux approches ne soit pas totalement parfait.
Observation de la faune et impact du changement climatique
L’équipage s’intéresse notamment à des espèces emblématiques telles que le poulpe, le paresseux, ou encore l’iguane marin, ainsi qu’à des environnements fragiles comme les récifs coralliens et les glaciers. En deux siècles, l’observation a gagné en précision, mais les résultats restent préoccupants. Par exemple, à l’instar de Darwin qui constatait la profusion d’iguanes aux Galápagos, Victor remarque au contraire une forte diminution de ces animaux, témoignant d’un déclin marqué de la biodiversité.
Les illustrations, peintures et croquis du carnet de Darwin permettent en outre de constater le recul important des glaciers et des côtes, directement lié au changement climatique. Ce panorama de la nature à travers les âges reflète une crise majeure : une phase d’extinction accélérée qui menace de bouleverser l’équilibre écologique mondial.
Une expédition sous le signe de la protection
À chaque escale, Victor Rault met en lumière le travail crucial des acteurs locaux engagés dans la préservation de la nature, valorisant leurs initiatives par le biais de films documentaires largement diffusés et suivis, notamment, par un jeune public scolaire. Parmi ces exemples figure l’organisation Save The Kiwi, qui lutte pour la sauvegarde de cet oiseau emblématique de Nouvelle-Zélande, menacé par la déforestation et la présence d’espèces invasives.
Au Brésil, il rencontre également des spécialistes comme Gaston Giné, dévoué à la protection des paresseux et des porcs-épics, espèces particulièrement vulnérables. Ces initiatives sont perçues comme essentielles dans un mouvement global visant à sauvegarder la biodiversité.
Une aventure de six ans autour du globe
L’expédition devrait se poursuivre encore plusieurs années. Victor Rault prévoit de mettre le cap vers l’Australie, l’île Maurice, l’Afrique du Sud, avant un retour au Brésil, avec une arrivée finale à Plymouth programmée pour le 21 septembre 2027. Ce périple, initialement prévu pour quatre ans, durera finalement six, dépassant ainsi de peu les cinq années du voyage original de Darwin. Sans hâte de conclure son aventure, le navigateur savoure chaque étape de cette immersion au cœur de la nature, poussant l’exploration scientifique et historique bien au-delà des frontières du temps.
Bienvenue à bord de « La Korrigane », le labo flottant bas carbone
Dans le sillage de l’expédition Captain Darwin, d’autres projets scientifiques prennent la mer, notamment La Korrigane, un bateau laboratoire conçu pour limiter son empreinte carbone tout en poursuivant des travaux de recherche marine innovants.
