Depuis des décennies, le nom de Stephen King est associé à l’horreur, capable de transformer l’ordinaire en éléments de suspense palpitant. Dans l’adaptation cinématographique de The Shining réalisée par Stanley Kubrick, le célèbre auteur a exprimé son profond mécontentement, pointant du doigt l’absence de transformation progressive du personnage de Jack Torrance. Alors que dans le roman, ce dernier subit une lente et tragique descente dans la démence, dans le film, il apparaît dès le début comme un individu déséquilibré dont l’évolution se contente d’exacerber cette instabilité.
Plusieurs points de divergence expliquent la fracture entre les deux œuvres :
- Absence d’évolution tragique : Dans le roman, Jack Torrance est un homme en lutte contre ses démons intérieurs et sa fragilité mentale, ce qui fait de sa chute une véritable tragédie. Kubrick, quant à lui, opte pour une interprétation statique et superficielle du personnage.
- Oppositions philosophiques : Le réalisateur semble percevoir les récits de fantômes comme porteurs d’un message d’après-vie, contrairement à King qui envisage un enfer perpétuel, une vision sombre de l’existence humaine caractérisée par un purgatoire permanent.
- Symbolisme congélateur vs incendiaire : Tandis que dans le livre, l’hôtel Overlook finit par brûler, symbolisant la purification par le feu, Kubrick choisit de représenter l’établissement comme un lieu où la froideur règne, accentuant le contraste entre chaleur et glacialité.
Ces divergences fondamentales témoignent de visions créatives radicalement opposées. D’un côté, un auteur qui voulait explorer les méandres de la santé mentale et ses conséquences déchirantes, de l’autre, un réalisateur instruit par une conception plus froide et esthétique de l’horreur. Les deux œuvres, bien qu’emblématiques, illustrent ainsi comment une adaptation peut perdre de vue la richesse émotionnelle et la profondeur d’un récit original.