Sommaire
L’essentiel
- Les analyses de la qualité des eaux de baignade menées sur les plages s’arrêtent au 15 septembre.
- La baignade, mais aussi des activités comme le surf ou le longe-côte, s’est pourtant développée toute l’année.
- Une association qui a effectué des relevés en dehors de la période estivale demande que la surveillance soit élargie tout au long de l’année.
Deux prélèvements quand il fait beau, un prélèvement après la pluie. Depuis plusieurs mois, l’association Eau et rivières de Bretagne s’emploie à effectuer des prélèvements d’eau de mer sur une dizaine de plages bretonnes. Ces analyses viennent en complément de celles réalisées chaque été par l’Agence régionale de santé pour vérifier que la baignade peut s’y dérouler sans danger. La différence, c’est que les prélèvements réalisés par l’ARS n’ont lieu qu’en période estivale, quand les plages sont les plus fréquentées.
Sauf que « la pollution des eaux de baignade ne s’arrête pas au 15 septembre », rappelle Eau et rivières de Bretagne. Et de plus en plus de personnes se baignent toute l’année ou presque : adeptes du longe-côte ou du surf qui n’ont aucune idée de la qualité des eaux dans lesquelles ils évoluent. La question se pose dans une région très agricole où l’épandage de lisier, l’usage d’engrais ou le recours aux pesticides viennent régulièrement souiller les cours d’eau. Ce phénomène est particulièrement visible après les fortes pluies, lorsque le ruissellement entraîne vers la mer les bactéries et déjections lessivées des sols.
Sur les neuf plages contrôlées, toutes n’affichent pas les mêmes résultats. Si le spot de surf du Minou, à Plouzané (Finistère), présente 100 % de prélèvements conformes, d’autres sites révèlent des concentrations élevées en bactéries Escherichia coli et en entérocoques intestinaux. Selon Eau et rivières de Bretagne, les rejets agricoles et des dysfonctionnements de stations d’épuration sont des causes identifiées : lorsqu’il pleut, les bactéries présentes dans les sols sont emportées par le ruissellement dans les cours d’eau jusqu’à la mer. Le phénomène ne s’arrête pas à la fin de l’été.
« La pratique ne s’arrête pas à la fin de l’été »
C’est pour cette raison que l’association demande que les analyses se poursuivent, même en dehors de la période estivale. « Oui, ce serait une bonne idée. Ça pourrait être d’utilité publique, car la pratique ne s’arrête pas à la fin de l’été. Ça pourrait rassurer les pratiquants de sports nautiques, les pêcheurs à pied, et pas seulement les touristes en été. On voit de plus en plus de gens se baigner quasiment toute l’année, la pratique s’est pas mal développée », témoigne Anthony Démon.
Ce Finistérien de 42 ans, fondateur de la Pagan Surf School, emmène des adultes et des enfants sur le spot de Boutrouilles, à Kerlouan. « On n’a pas de problème de pollution sur cette plage. L’eau est même d’excellente qualité. C’est parce qu’on n’a pas de rivière qui débouche sur la plage. » Sur la plage voisine du Lerret, seulement 11 % des analyses menées sont jugées « bonnes ». La qualité des eaux n’empêche pourtant pas les surfeurs du Finistère de continuer leur pratique.
« On a toujours plus ou moins baigné dedans. Moi, ça ne m’a jamais limité dans ma pratique. Des otites, on en a tous eu. C’est arrivé parfois d’avoir des rougeurs ou des démangeaisons cutanées. » À la sortie de l’eau, Anthony se rince soigneusement. Au club de marche aquatique des Vénètes, les adhérents adoptent la même précaution.
« Le risque est très faible »
Forte de ses 220 adhérents, l’association de Damgan (Morbihan) suit avec attention les résultats des analyses qui lui sont envoyés par l’ARS. Mais depuis un mois, les prélèvements ont été stoppés et l’association évolue « à l’aveugle ». « On a quelques personnes qui se posent des questions. Alors oui, je pense que ce serait bien qu’on étende la surveillance au moins d’avril à octobre », reconnaît Christine Guyot.
Malgré les piètres résultats publiés par certains relevés, la présidente du club refuse le catastrophisme. « Lundi, l’eau était tellement claire qu’on voyait nos pieds. Cela fait plus de douze ans que je suis à la tête de l’association et je n’ai jamais entendu parler qu’un adhérent soit tombé malade. On ne met pas la tête sous l’eau, le risque est très faible. » Les encadrants restent toutefois vigilants quant aux plaies apparentes chez leurs pratiquants : « Si on s’en rend compte, on peut leur interdire d’aller dans l’eau. Les gens le comprennent très bien », assure Christine Guyot.
« On a des gens qui sont hyper flippés »
La réputation de certaines plages a refroidi certains usagers. À Landunvez, l’école de surf Sweet Spot a pâti d’articles pointant la pollution récurrente d’une rivière locale, dénoncée par des habitants. « Il faudrait diviser les zones. Car dans la zone de surf, on n’a jamais de problème. Il suffit d’éviter certains secteurs. Mais la communication est trop alarmiste », explique Grégory Closier, responsable de l’école.
Au-delà des cours de surf, la fréquentation de la plage de Penfoul a diminué ces dernières années. « On a des gens qui sont hyper flippés, qui imaginent qu’ils vont tomber malades s’ils mettent un pied dans l’eau. Il ne faut pas nier le problème, mais il faut être lucide sur les risques. » Lui aussi plaide pour une surveillance annuelle de la qualité : « Quand on ne contrôle pas, certains font n’importe quoi. »
Pour protéger la population et l’informer de la qualité des eaux de baignade, Eau et rivières de Bretagne préconise le maintien d’une surveillance sanitaire toute l’année « pour trois ou quatre plages » par secteur, notamment les plus fréquentées par les surfeurs et les adeptes du longe-côte. Un choix raisonné mais coûteux. « Il est difficilement envisageable de maintenir un suivi sur l’année, compte tenu des coûts et de la mobilisation des agents nécessaires », répond la ville de Douarnenez, qui a choisi de réaliser ses propres analyses en raison de résultats bactériologiques récurrents.
La municipalité insiste sur la nécessité de distinguer les différentes zones de la plage : la zone de baignade, où les résultats sont souvent bons, et l’embouchure, où ils sont régulièrement mauvais. Pour alerter les habitants, des affichages déconseillant la baignade dans certaines zones ont été mis en place.
