Saints Incorruptibles Pourquoi leurs Corps ne Se Décomposent Pas

par Zoé
0 commentaire
A+A-
Reset
Saints Incorruptibles Pourquoi leurs Corps ne Se Décomposent Pas

Les Saints Incorruptibles : Le Mystère des Corps Intacts

Il est communément admis que la mort et les impôts sont inévitables, comme l’énonçait le dramaturge anglais Christopher Bullock en 1716. Cependant, un autre phénomène mystérieux défie cette certitude : la putréfaction des corps humains après la mort. En effet, dès les premiers instants suivant le décès, le processus de décomposition débute, transformant lentement le corps en un squelette décharné. Les scientifiques ont minutieusement étudié ces étapes, des premiers instants après le trépas jusqu’à la phase ultime de décomposition, documentée par Medical News Today. Ce processus naturel fait que la notion de saints incorruptibles, dont les corps semblent défier le temps et la décomposition, intrigue depuis longtemps les fidèles des églises catholiques et orthodoxes.

Mais qu’en est-il exactement des saints incorruptibles ? Quelle est la vérité derrière ces récits de corps préservés de manière surnaturelle ? C’est ce que nous explorerons dans cet article, plongeant dans l’histoire, la science et la culture qui entourent ce phénomène mystérieux.

Christianisme et Miracles autour de la Mort et de la Résurrection

Au cœur de la foi chrétienne se trouve le concept de mortalité, résultant du « péché originel » survenu lors de la chute d’Adam et Ève dans le Jardin d’Éden. Pour se libérer de ces « sins of the father » hérités par tous les descendants d’Adam et Ève, les premiers chrétiens croyaient que Jésus-Christ, en mourant sur la croix et en ressuscitant le troisième jour, représentait à la fois le sacrifice ultime et le renversement du « péché originel » et de la mort. Jésus, outre sa résurrection miraculeuse, a également ramené à la vie des individus décédés de son vivant, dont Lazare, resté trois jours dans sa tombe putréfiée avant d’être transformé en être humain vivant par Jésus. Pour certains premiers chrétiens, une extension naturelle de ces miracles serait l’incorruptibilité après la mort, signe de sainteté.

Une distinction essentielle est établie dans l’ouvrage de Joan Carroll Cruz, « The Incorruptibles: A Study of the Incorruption of the Bodies of Various Catholic Saints and Beati », entre les corps miraculeusement préservés et ceux dont la décomposition a été arrêtée accidentellement ou délibérément. Par exemple, on pense que les pharaons égyptiens de l’Antiquité, célèbres pour leur préservation artificielle, ont été inspirés par la découverte de corps naturellement préservés dans l’environnement aride de l’Égypte. Cependant, les saints incorruptibles se distinguent de ces momies traditionnelles, car les phénomènes naturels ne peuvent pas toujours expliquer leur préservation exceptionnelle. Ces incorruptibles présentent des caractéristiques singulières, telles qu’une apparence humaine, une flexibilité et la préservation de « sang et d’huiles claires ». Beaucoup dégagent également un parfum sucré, défiant les processus normaux de décomposition. L’incorruptibilité semble ainsi surpasser la science et la réalité, les corps étant préservés au-delà de la décomposition physique.

L’Incorruptibilité : Un Miracle Éphémère

L’incorruptibilité n’implique pas nécessairement une préservation éternelle pour attirer l’attention des croyants. En effet, le critère de l’incorruptibilité ne stipule pas que le corps ne peut pas pourrir ultérieurement. Il suffit que la préservation surnaturelle ait eu lieu à un moment donné dans l’histoire du cadavre. Ce critère s’applique également aux parties du corps, qui peuvent être traitées pour préserver ce que Dieu a déjà fait. Ces traitements peuvent inclure des bains acides et des enveloppements de cire. Lorsqu’il s’agit de parties du corps, celles-ci sont souvent exposées séparément, comme le cœur de Saint Vincent de Paul ou la mâchoire et la langue de Saint Antoine de Padoue. Qu’il s’agisse d’un miracle ou non, les corps (et parties du corps) des saints ont reçu une « grande estime » de la part des fidèles catholiques et orthodoxes. Même l’usure n’affecte pas le statut d’incorruptible, car les miracles n’ont pas à se poursuivre indéfiniment pour que le corps soit considéré comme surnaturel.

De fait, des réparations régulières sont effectuées, comme en témoignent les travaux réalisés sur le corps de Sainte Rita au fil des ans, incluant l’utilisation de ficelle et de cire pour améliorer son apparence. Ces réparations, relevées lors d’investigations médicales menées en 1743 et 1892, sont acceptées par les autorités religieuses comme un entretien nécessaire pour maintenir les reliques en parfait état.

À la Recherche des Reliques : Découvertes et Canonisations

Comment les fidèles découvrent-ils des corps préservés de manière anormale ? D’après Simply Catholic, ces découvertes sont souvent le fruit du processus de canonisation des saints, une procédure longue nécessitant l’exhumation de leurs corps pour plusieurs raisons. Tout d’abord, localiser le corps potentiel d’un saint assure aux autorités religieuses que l’individu en question a réellement existé. Ensuite, cela permet de découvrir des reliques associées au saint et de les répartir dans diverses églises à travers le monde. Enfin, cette démarche permet, pour les saints n’ayant pas subi le martyre, de disposer d’une preuve claire de miracles posthumes, impliquant la nécessité d’avoir les restes du saint (quelle qu’en soit la forme) à portée de main.

Durant ces exhumations, il arrive parfois que les autorités religieuses fassent des découvertes surprenantes, telles que des corps ou des parties de corps extraordinaires bien préservés. À mesure que le nombre de prétendus incorruptibles augmentait, certains fidèles étaient particulièrement influencés par cette manifestation physique du miraculeux. Des exemples contemporains de ce processus incluent la candidature à la sainteté du révérend Patrick Ryan par la Basilique des Saints Pierre et Paul de Chattanooga, dans le Tennessee. Ryan a été exhumé avec la découverte de reliques, dont des vêtements liturgiques, un crucifix en bois et un scapulaire, qui ont été transférés avec ses restes dans la basilique, bien qu’aucune preuve d’incorruptibilité n’ait été trouvée.

Le Catholicisme Romain et les Incorruptibles

La foi catholique compte des dizaines de prétendus incorruptibles, selon Pacific Standard. Discover estime que plus de la moitié se trouvent en Italie. D’autres destinations prisées pour l’observation d’incorruptibles incluent la Pologne, l’Espagne, la France, la Belgique, l’Autriche, l’Inde, l’Allemagne, le Liban et le Pérou. L’aversion moderne de nombreux fidèles face à ces reliques explique en partie la disparité du nombre d’incorruptibles présents dans ces différents pays.

Malgré le déclin du nombre de visiteurs au fil des siècles, les incorruptibles restent en exhibition dans des églises et des chapelles du monde entier. Depuis le milieu du XXe siècle, l’Église catholique fait appel à la science pour mieux comprendre les incorruptibles et aider à la préservation des cadavres de personnalités contemporaines. Cette démarche a brouillé la frontière entre le surnaturel et le scientifique. Aujourd’hui, Ezio Fulcheri, de l’Université de Gênes, articule le point de vue de l’Église catholique romaine sur les incorruptibles en s’intéressant à la science derrière ces phénomènes inexplicables.

Le Rôle des Incorruptibles dans la Foi Orthodoxe Orientale

Tout comme la foi catholique romaine, l’Église orthodoxe orientale ne considère pas l’incorruptibilité comme un prérequis à la canonisation d’un saint. Cependant, elle est hautement estimée et associée à d’autres miracles, dont des guérisons. Le sujet des incorruptibles est sensible pour l’Église orthodoxe orientale. Bien que celle-ci valorise grandement les reliques déclarées miraculeuses, le statut des corps humains préservés de manière inhabituelle est plus complexe. Selon le Troisième Synode de Moscou de 1666, « que personne n’ose désormais honorer et révérer les corps des morts qui, même de nos jours, sont trouvés intacts et incorruptibles comme saints sans témoignage crédible et approbation synodale ».

Certaines causes de conservation de corps non décomposés peuvent être moins nobles, telles que des transgressions religieuses ou des malédictions par des prêtres ou évêques, comme illustré dans l’œuvre de Bram Stoker, Dracula. Malgré cela, l’incorruptibilité demeure une notion intrigante et respectée dans la tradition judéo-chrétienne.

L’Héritage des Incorruptibles dans le Judaïsme

Le christianisme ayant des racines dans la tradition juive, il n’est pas étonnant de retrouver des concepts communs aux deux traditions, dont celui de l’incorruptibilité comme un miracle divin. Les légendes juives regorgent d’histoires fascinantes, comme celle du prophète Baruch, dont le corps préservé a émerveillé les générations ultérieures. D’autres saints incorruptibles, tels que Ubald de Gubbio, Sainte Marguerite de Savoie et Sainte Savina Petrilli, défient toute explication rationnelle quant à leur préservation exceptionnelle.

Les Contestations des Incorruptibles

Les détracteurs des incorruptibles argumentent que certains individus bien préservés n’étaient pas réputés pour leur sainteté. Des cas comme celui de l’archevêque italien le cardinal Shuster, dont le corps serait resté incorruptible 31 ans après son décès, soulèvent des interrogations sur la véritable nature de cette préservation. Rappelons également le cas de Rosalia Lombardo, la « belle endormie » des Catacombes des Capucins de Palerme, Sicile, dont l’embaumement a abouti à une préservation saisissante.

En outre, des cas tels que celui de l’homme du marais de Tollund, découvert au Danemark en 1950, illustrent comment des conditions environnementales uniques peuvent conduire à une préservation parfaite. Malgré leur aspect bien préservé, ces individus n’étaient pas nécessairement des figures saintes, remettant en question la notion d’incorruptibilité dans le contexte de la canonisation.

Les Tentatives Contemporaines de Créer des Incorruptibles

Des chercheurs, commissionnés par le Vatican dans les années 1970, ont tenté d’améliorer le processus de momification des saints, mais l’utilisation de produits chimiques dangereux a eu des conséquences tragiques, entraînant la mort de presque tous les membres de l’équipe. Ces tentatives, bien que motivées par un désir de lutte contre la décomposition, ont eu des résultats désastreux. Il est désormais reconnu que de nombreux cas d’incorruptibilité peuvent s’expliquer par des pratiques d’embaumement ou des conditions environnementales spécifiques, brouillant la frontière entre le naturel et le surnaturel.

Suggestions d'Articles

Laisser un Commentaire