Réemploi en danger : 1000 emplois menacés par un appel d’offres
Le réseau Envie, acteur majeur du réemploi en France, se trouve dans une situation préoccupante suite à la perte de plusieurs lots dans un appel d’offres. Cinq de ses principaux lots ont été attribués à d’autres entreprises, mettant en péril la pérennité de cinq sites logistiques et menaçant directement environ 1000 emplois. Selon les responsables d’Envie, cette situation est le résultat d’une décision économique qui sacrifie l’insertion et le réemploi au profit de critères tarifaires.
Depuis plus de quarante ans, Envie, qui regroupe 53 entreprises et emploie 3.800 salariés, s’illustre dans la collecte, la réparation et la revente d’appareils électroménagers et multimédia en fin de vie. En tant que leader du réemploi en France, l’organisation a également pour mission d’insertion, ayant formé et embauché plus de 15.000 personnes éloignées de l’emploi depuis sa création à Strasbourg, en 1984. Malgré les discours élogieux des ministres sur l’importance de l’économie sociale et solidaire, Envie se retrouve désormais « en grand danger », selon son délégué général, Guillaume Balas.
Le 5 novembre, lors d’une cérémonie à l’Hôtel de Ville de Paris, les ministres du Travail et de la Transition écologique avaient reconnu le rôle central d’Envie dans le paysage socio-économique. Cependant, l’annonce des résultats de l’appel d’offres en avril a ravivé des craintes quant à l’avenir du réseau. Sur la centaine de lots mis en jeu, Envie a conservé quinze d’entre eux, gagné six, mais perdu neuf, dont cinq fondamentaux. Cela pourrait entraîner la fermeture de sites essentiels à Rennes, Nantes, Angers, Niort et Mulhouse, ainsi qu’une diminution des appareils en fin de vie disponibles pour reconditionnement, affectant ainsi la mission d’Envie.
Guillaume Balas a exprimé que « 1000 emplois sont menacés directement ou indirectement, dont trois quarts concernent des parcours d’insertion ». Face à cette crise, il a critiqué le choix d’Ecosystem, éco-organisme responsable de la collecte et du recyclage des produits électriques et électroniques, qui a selon lui favorisé les critères économiques au détriment du réemploi et de l’insertion.
Ce choix s’oppose aux ambitions de la loi Agec, qui prône le réemploi et le reconditionnement plutôt que le recyclage. Malgré les promesses gouvernementales, la réalité opérationnelle semble avoir contourné ces déclarations. Le débat autour de ces décisions a gagné l’Assemblée nationale, où des députés ont interpellé la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, sur l’impact dévastateur de cet appel d’offres. En réponse, la ministre a assuré se préoccuper de la préservation des activités d’Envie, mettant en avant l’importance de l’accès aux gisements de réemploi.
Nathalie Yserd, directrice générale d’Ecosystem, a exprimé sa compréhension face à la colère et la déception d’Envie, tout en précisant que les règles de la concurrence avaient été respectées. Le groupe Brangeon, qui a remporté l’appel d’offres dans l’Ouest, est critiqué pour son approche axée sur l’élimination plutôt que sur le reconditionnement. En réponse, Ecosystem a proposé que même si Envie ne gère plus la logistique de ces lots, elle pourrait continuer à accéder aux appareils collectés pour ses activités de reconditionnement. Les deux entités disposent désormais de moins d’un mois pour trouver un terrain d’entente avant le début du nouvel appel d’offres.