Dans l’un des épisodes les plus révoltants liés à l’occupation américaine de l’Afghanistan, Erik Prince, dirigeant d’une importante entreprise militaire privée, avait proposé de facturer 6 500 dollars par personne pour organiser des vols d’évacuation depuis Kaboul, selon Business Insider. Cette pratique, qui rappelle les méchants des dystopies capitalistes, symbolise profit et dérives dans un contexte de guerre prolongée au Moyen-Orient. Et si l’on se penche sur les chiffres, les conséquences ne laissent pas indifférent : en 2019, on dénombre environ 150 000 victimes en Afghanistan – plus de 43 000 civils, journalistes et travailleurs humanitaires – et ce n’est qu’une partie d’un total effarant dépassant les 800 000 vies perdues suivant les régions.
Lorsque le président Biden a annoncé le retrait progressif des troupes en Afghanistan, nul n’aurait pu imaginer une conclusion moins glorieuse à deux décennies de conflit sanglant. Une évolution marquée par un recours accru aux frappes de drones, exacerbant les risques d’effets collatéraux et augmentant le nombre de victimes civiles. Ce changement, soutenu par diverses analyses, laisse entrevoir l’imprévisibilité d’un conflit déjà jugé catastrophique.
La guerre en Afghanistan, qui a coûté aux contribuables américains 300 millions de dollars par jour, représente plus de 2 trillions de dollars sur 20 ans. Voici quelques points marquants :
- Chaque jour, 300 millions de dollars dépensés pour soutenir une longue et coûteuse campagne militaire.
- Un coût de près de 50 000 dollars par habitant pour une population de 40 millions d’habitants en Afghanistan.
- Des dépenses colossales comparables à la richesse combinée de plusieurs grands milliardaires américains.
Des faits encore plus déroutants émergent dans la gestion des fonds : des millions ont été alloués à des projets vains ou mal gérés. Par exemple, afin de satisfaire une demande d’esthétisme local, le gouvernement afghan a investi 28 millions de dollars dans la fabrication de camouflage forestier, alors que le pays ne comptait qu’un infime pourcentage de forêts. De même, sur les 8 milliards dépensés pour des infrastructures militaires depuis 2008, seule une fraction a survécu à l’usure du temps. En outre, dès 2018, le rapport du Special Inspector General for Afghanistan Reconstruction faisait état de 15 milliards de dollars de fonds détournés ou gaspillés, pour un total cumulé d’erreurs et de pertes s’élevant à 83 milliards de dollars.
Sans oublier que près de 800 milliards de dollars ont été mobilisés pour le combat direct, et 85 milliards consacrés à la formation de l’armée afghane, qui s’est rapidement effondrée face aux avancées talibanes. Aujourd’hui, dans un climat de désillusion, les demandes financières pour l’évacuation soulignent l’ampleur des dérives : 6 500 dollars par personne pour fuir une zone de conflit où, derrière ces chiffres, se cachent des centaines de milliers de vies perdues et d’innombrables opportunités manquées dans les domaines de la santé, de l’éducation, ou du développement.